Dans le numéro 39 de l’Envolée tout juste paru, nous avons expliqué la difficulté systématique pour les prisonniers d’obtenir des aménagements de peine quelque soit le lieu de leur incarcération. Dans la lettre qui suit, Herbert nous parle de la situation locale au centre pénitentiaire de Réau : les prisonniers font les frais de la mutation d’une juge d’application des peines et pour organiser les passages en commission d’application des peines, sa collègue du TGI de Melun jongle avec les numéros d’écrou pairs et impairs. Les impairs ne passeront pas en CAP avant octobre !

Lettre d’Herbert depuis le centre pénitentiaire de Réau:

Le 02/06/2014

Salut à tous

Déjà 3 ans que cet enfer de Réau existe  ! Par une coïncidence inattendue, l’OIP a envoyé a certain détenus du CPSF de Réau, une enquête en 20 questions sur les conditions de vie de l’établissement. Cela même au moment où les détenus manifestent une révolte, une lassitude et l’incompréhension totale face à une administration visiblement débordée  !

De tous les dysfonctionnements celui concernant les modalités d’accès à la liberté, c’est à dire la réinsertion. Les normes et les règles changent sans l’avis des principaux concernés, les repères sont faussés, des familles éclatent, et des hommes et des femmes se retrouvent brisés. Les périodes de probatoires deviennent des périodes de sûreté. Le manque d’effectif surmultiplie les pouvoirs d’un juge d’application des peines ce qui conduit à des situations ubuesques. Exemple, un détenu dans les conditions d’une mesure probatoire à la libération conditionnelle en février 2014, s’est vu par 7 fois rejeté ses demandes avec pour finalité une fin de non recevoir de la JAP qui considère que pour toute nouvelle demande, aucune dérogation ne sera faite avant septembre 2015. Il faut noté que ce détenu présente toutes les garanties d’une réinsertion réussie. Hélas  ! Pure hérésie. Une autre bizarrerie, eugénisme semble être de mise puisque l’AP a jugé bon d’opérer une sélection pour le moins arbitraire puisque le retour aux années 1940 est d’actualité (c’est le cas de le dire) car une véritable déportation a eu lieu ici du 9 au 13 décembre 2013 avec pour effet de créer deux catégories, les parias et l’élite.

Les parias se retrouvent en autarcie dans un bâtiment où les lois se réinventent chaque jours. Le paria n’est plus un citoyen, seulement un prisonnier. De plus le régime d’oppression réel s’est installé depuis la décision de l’AP de garder toutes les portes closes. Un régime parfaitement inadéquat pour les longues peines. Une impression de dénigrement et d’abandon total gagne peu à peu chaque cellule. Dans toute la détresse morale, sociale, le soutien du SPIP est essentiel et primordial à tel point que les CIP sont parfois des relais et parfois hélas l’espion de la JAP. Néanmoins leur rôle et leur action sont le seul moyen pour les prisonniers de pouvoir accéder à leur dignité et liberté.
Les attentes sont donc énormes et les espoirs souvent déçus. C’est dommage car des crispations, des frustrations, naissent d’un double discours  ! Malgré le désir de bien faire, d’être autre, de surmonter les épreuves avec l’aide de celui ou celle qui est censé aidé, accompagné «  le public empêché  ». La première difficulté qui ne regarde en rien le détenu est le nombre de dossiers qu’un humain est capable de traiter. En un mot, FOUTAISE  !!! Conséquence, des dossiers mal traités, des délais trop longs font que les prisonniers perdent confiance. Heureusement en attendant mieux ce fameux «  public empêché  » vaille que vaille résiste, car la nature humaine tire toujours le meilleur d’elle-même quand elle est acculée  !

Pas le temps pour les regrets  !! Le combat continue…

Voici une affichette trouvée en détention… explicite !

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