Six mois depuis le dernier numéro de l’Envolée. Deux élections sont passées par là. Sarkozy est parti, et avec lui le principe: un fait divers, une loi sécuritaire. À voir… L’abrogation de certaines mesures du précédent gouvernement a été annoncée: peines planchers,rétention de sûreté… en tout cas, encore rien au Journal officiel. Quant aux constructions prévues, le plan des 24000 nouvelles places devrait être divisé par trois. Oh,ce n’est pas par bonté d’âme, mais tout bêtement pour une question de trésorerie : il s’agit d’économiser 3 milliards d’euros. Problème comptable. D’ailleurs, lorsque le contrôleur général des lieux de privation de liberté propose à la veille du 14 juillet une amnistie pour les très courtes peines,le gouvernement s’empresse d’exclure cette possibilité: «ce serait un mauvais signe,et les décisions de justice doivent s’appliquer. » Aucune voix ne s’est élevée pour défendre cette très modeste proposition, qui n’aurait pas changé grand-chose à la situation générale des prisons, mais beaucoup à celle des personnes concernées. Et quant à  la traditionnelle amnistie post-électorale, il n’en a même pas été question. Alors quand la ministre de la justice Christiane Taubira s’insurge contre le tout-carcéral, l’enfermement des mineurs et la surpopulation, on ne s’y trompe pas. Le Parti socialiste a toujours carburé au sécuritaire –à sa sauce. Ce qui nous menace sous ce pouvoir, c’est l’adhésion passive, citoyenne aux règles du système capitaliste. La profession de foi de ne recourir à la prison qu’en dernière instance ne nous leurre pas davantage: cet été, on a atteint des chiffres d’incarcération record. Les peines alternatives à l’enfermement risquent de se cumuler à lui plutôt que de le remplacer. La mise sous bracelet électronique qui devait se substituer à l’incarcération a explosé en deux ans tandis que le nombre des enfermés ne cessait de croître. Aucune loi n’a encore été votée, mais le ministère de la justice émet des directives dans lesquelles l’individualisation des peines reste le leitmotiv : à chacun sa peine et son parcours de prisonnier, dedans comme dehors. Contrôler la population autant par le judiciaire que par le carcéral, étendre la prison hors les murs,voilà ce que risque d’être la contribution des socialistes. Justice partout, prison partout. Pour le moment, la seule réalité concrète pour les prisonniers, c’est le béton. Depuis plus de six mois, à Roanne, Vezin-le-Coquet près de Rennes, Argentan, Annoeullin près de Lille, Seysses près de Toulouse, Ducos en Martinique, Nouméa en Nouvelle-Calédonie, des prisonniers exigent, réclament, se battent, font du mitard,subissent des transferts, mais ne lâchent pas l’affaire. Ce sont ces combats que nous relayons dans ce numéro de l’Envolée, dont nous avons doublé le tirage dans l’intention de le faire circuler bien plus largement qu’à l’accoutumée. On verra à la lecture combien ils ont besoin d’une solidarité active à l’extérieur. Une solidarité qui se donne les moyens de dépasser les cercles de militants déjà convaincus. Une solidarité qui se fonde sur la justesse d’analyses qui sortent tout droit de l’intérieur. Une solidarité qui rappelle que ce qui se passe dedans n’est que l’image grossie de ce qui se passe dehors. Une solidarité en acte.

Prisonnières et prisonniers recherchent complices !

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