« Y a aucun respect de la vie humaine » – Message de Fleury-Mérogis

On relaie un message envoyé par un prisonnier de Fleury-Mérogis qui dénonce les conditions de détention. A faire tourner au maximum !

Nous, actuellement à Fleury-Mérogis, il y a tellement de violences de l’administration pénitentiaire, tellement de maltraitances, nos cellules sont remplies de cafards… Nos conditions de vies sont invivables, les cantines alimentaires, on se les fait voler, sans parler même des violences verbales, sans parler des menaces, sans parler des détenus qui peuvent pas se défendre, qui ont même pas la capacité de se plaindre. Concrètement, y a des surveillants ou drogués ou alcooliques complètement désœuvrés, qui savent même pas faire leur métier, ils sont agressifs, autoritaires. Là, à cette heure-ci, je suis dans une cellule, j’ai pas de fenêtre, je peux pas les fermer, j’ai pas de lumière, j’ai pas de cabine téléphonique – je suis obligé de trouver un téléphone de manière illégale pour appeler et pouvoir faire passer cette info.

J’ai des cafards dans ma cellule, j’ai même pas accès à la douche. Moi-même qui suis handicapé, j’ai de gros problèmes de santé. À l’heure d’aujourd’hui dans la prison, pour ceux qui ont des problèmes de santé, il est très difficile d’avoir accès au médical. Mais, par contre quand vous arrivez au bout d’une heure, vous avez une ordonnance pour avoir des antipsychotiques, des neuroleptiques et des somnifères, ça on vous en donne directement. Sans parler de la violence pénitentiaire qu’on vous fait subir là, de toute façon quand vous demandez des choses, les surveillants, ils nous donnent aucune réponse. De toute façon, c’est simple, on peut sortir qu’une heure par jour ici, donc c’est comme ça la gestion des détenus. 

Vous entendez le tapage de porte là ? C’est un détenu qui conteste ça fait trois heures qu’il conteste, ça fait trois heures qu’il demande juste à avoir du PQ – qu’on doit lui ramener. Le surveillant, il en a rien à foutre, il est dans son bureau, il répond pas. Le chef, moi ça fait cinq jours que je suis sans fenêtre, je peux pas les fermer, ça fait cinq jours que j’ai pas de lumière, ça fait cinq jours que j’ai pas de télé – alors que concrètement j’ai de l’argent sur mon pécule on peut pas me dire le contraire – ça fait cinq jours que j’ai pas de cabine et il m’a dit quoi le surveillant ? Il m’a dit « ben t’iras quand tu seras en promenade », mais en promenade, j’ai pas de cabine, je peux pas appeler.

J’ai pas de moyens d’appeler mon avocat, j’ai pas de moyens de revendiquer mes droits. Quand je demande aux surveillants de manière normale à avoir accès à mes droits, j’ai aucune réponse cohérente. Donc concrètement, aujourd’hui, la population pénale, elle en peut plus. Là de plus en plus, y a des tests de stupéfiants et d’alcoolémie pour les surveillants qui sortent de détention mais si les gens s’informent, ils verront bien que les taux étaient positifs alors même qu’ils viennent de sortir de détention, ces surveillants-là, ils seront positifs aux stupéfiants ou à l’alcool, alors que bon…

Nous, on demande la stricte application des normes européennes en matière de conditions de détention. On demande le respect de nos droits, le respect de notre vie humaine. On demande des caméras, comme ça on peut être sûr que l’intervention, elle sera être sécurisée, pour eux et nous-mêmes surtout. Surtout nous-mêmes parce que eux parlent de manque de moyens, mais si on leur donne des caméras, est-ce qu’ils voudront accepter de porter des caméras ? Étant donné qu’on connaît bien les pratiques illégales envers les détenus, on voit très bien les comportements…

Nous, à cette heure-ci, on demande des lois, on demande que les politiques prennent à bras-le-corps le sujet. On nous dit à la télé, les surveillants parlent qu’il y a une surpopulation, ils parlent qu’il y a pas de moyens, ils parlent qu’ils sont en danger alors que c’est faux. On le sait très bien. Nous, on demande des caméras sur les surveillants, on demande des caméras sur les surveillants dans les quartiers dédiés tels que les UDV (Unité pour détenus violents) qui ne sont rien de moins que des QHS (Quartier haute sécurité), où là on met des violences et des piqûres ++, on demande des caméras aux surveillants des quartiers disciplinaires, afin de voir réellement qui acte la violence et qui est à même de condamner qui, et qui est à même de juger qui. On demande la stricte application de transferts pour les détenus qui ont eu des rapports disciplinaires dans certains établissements pénitentiaires afin de garantir l’intégrité pour eux-mêmes et pour l’intégrité physique des surveillants pénitentiaires afin que ce soit du 50/50, étant donné qu’à l’heure d’aujourd’hui, on ne peut pas contester le fait que la seule entité française de l’administration, c’est l’administration pénitentiaire, qui est la seule autorité à ne jamais être contestée, à ne jamais être surveillée, à ne jamais devoir répondre de leurs actes, alors qu’on sait très bien que nous, détenus, on le voit tous les jours : le taux de violence est énorme, et non pas de la part des détenus sur l’administration, mais bien de l’administration sur les détenus.

Il y a tellement de choses qui sont inexplicables et qui sont même pas entendables pour les gens normaux qui sont dehors, qui n’ont pas commis de délit ou qui sont pas en prison… que c’est même pas entendable de les exprimer là en deux minutes. Ce serait même pas entendable. Pourtant toutes les familles de victimes, de détenus qui sont décédés au mitard, toutes les familles qui voient des détenus au parloir… Combien de gens ici par semaine à Fleury-Mérogis, on leur dit « mais non, votre fils n’est pas venu au parloir », « mais non, votre mari n’est pas venu », alors que le détenu on lui dit « non c’est papa qui est pas venu »… Des deux côtés, on leur dit la même chose, et il y a pas de parloir. Y a aucun respect de nous, y a aucun respect de la race humaine, y a aucun respect de la vie humaine, alors l’école du crime, bah tu l’apprends ici, tu l’apprends de la part du surveillant. Tu l’apprends de la part du surveillant quand il te dit « ferme ta gueule » quand il t’a volé tes cantines, quand il t’a fermé la porte… T’as appris une chose. T’as appris que l’autorité, elle garantit qu’une chose, la criminalité. Voilà ce que t’as appris. C’est pour ça qu’on demande des caméras afin de sécuriser autant la population pénale que l’administration pénitentiaire, afin de condamner les deux en cas de nécessité, et afin de garantir l’État de droit. Et on demande la stricte application du droit européen en matière de conditions de détention. Voilà.


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