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  • Lettres sur la supposée abolition de la peine de mort – Lutte des proches de Jimony, mort à Meaux-Chauconin le 2 février

    Lettres sur la supposée abolition de la peine de mort – Lutte des proches de Jimony, mort à Meaux-Chauconin le 2 février

    Émission de l’Envolée du vendredi 14 Mai 2021
    • Encore une semaine bien pourrie : Super Dupond et le PC annoncent vouloir pouvoir coller jusqu’à 30 ans de sûreté pour les attaques contre les forces de l’ordre.
    • 40 ans après, la peine de mort n’est toujours pas abolie : tous les 3 jours en moyenne, on meurt en prison, que ce soit par suicide, par manque de soin, ou entre les mains des matons.
      Une lettre de Youssef, de la Maison d’Arrêt d’Angoulême, qui répond au ministre des tribunaux et des prisons sur ses annonces et réformes. et une lettre de Francis Dorffer qui revient sur son parcours en prison et les condamnations qui s’empilent à l’intérieur. La prison, et en particulier les quartiers d’isolement où il a passé 13 ans, enterrent vivant·e et ne laisse aucune chance.
    • Des membres de la famille de Jimony Rousseau Sissoko sont venus nous raconter la lutte qu’ils mènent depuis sa mort à la prison de Meaux-Chauconin le 2 février 2021. Des témoignages de matons et de prisonniers confirment qu’il a bien été tué par des surveillants. Elles reviennent sur les circonstances de sa mort, le traitement inhumain de Jimony par l’AP jusqu’à son dernier souffle, et le combat nécessaire pour demander justice et faire connaître la vérité. Vous pouvez les suivre sur leur page facebook et sur leur page instagram « Justice pour Jimony ».
    • Agenda : RDV le 30 mai à Lyon, Paris, Perpignan, Saint Étienne, etc., contre les violences pénitentiaires et pour demander la fermeture des quartiers disciplinaires et des quartiers d’isolement // le 15 mai à Argenteuil marche en hommage à Sabri tué par la police // le 15 mai à Paris rassemblement en soutien avec le peuple palestinien
    Musiques :
    Can’t breath either par Ocean Wisdom
    Cosmosis par Tony Allen, Ben Okri, et Skepta
    Les chants de Maldoror par Swift Guad, Al’Tarba, Senza et Vîrus
    Infrarouge par Frenetik

    L’Envolée est une émission pour en finir avec toutes les prisons. Elle donne la parole aux prisonniers, prisonnières et leurs proches & entretient un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur des prisons de toute sorte. L’Envolée est aussi un journal d’opinion de prisonniers, de prisonnières et de proches.

    Pour nous joindre : 07.52.40.22.48 (WhatsApp, Telegram, Signal, appels et textos). Pour écrire : Radio FPP – L’Envolée, 1 rue de la solidarité, 75019 Paris, ou encore à contact@lenvolee.net et sur instagram, twitter, facebook & snapchat.

    Direct chaque vendredi de 19 à 20h30 sur FPP 106.3 en région parisienne et MNE 107.5 à Mulhouse, RKB 106.5 en centre-Bretagne lundi à 22h, PFM à Arras et alentours 99.9 mardi à 21h30, jeudi à 17h30 à Toulouse sur Canal Sud 92.2,et sur les webradios Pikez (dimanche à 11h) et Station Station (lundi à 13h). Podcasts disponibles sur toutes les plateformes !

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    La censure qui frappe le numéro 52 ne concerne « que » ce numéro en détention. Contactez-nous !

  • Recours à la CEDH des prisonniers de Condé – Lettres du QI – Encore un mort en CRA

    Recours à la CEDH des prisonniers de Condé – Lettres du QI – Encore un mort en CRA

    Émission de l’Envolée du 7 Mai 2021
    • Appel de Benoît David, avocat, pour parler du recours à la CEDH des prisonniers de Condé sur Sarthe suite au mouvement de m… de 2019 qui avait bloqué tout mouvement et activité dans la détention et livré les prisonniers aux Eris.
    • Lettre de Fabrice récemment transféré à Condé sur Sarthe. Il a besoin de soutien et de montrer à l’A.P qu’il n’est pas tout seul. Ecrivez-nous pour qu’on vous donne son contact.
    • Lettre de Libre Flot depuis le QI de Bois d’Arcy, qui revient longuement sur les effets du Quartier d’Isolement. Message de Saint Maur et discussion sur l’existence supposée de « gentils matons ».
    • Billet de Coco sur la Santé en prison, la loi « Papon » et le « consentement éclairé ». (personne n’y a droit, mais en plus, si tu vas mieux, tu retournes à l’intérieur et ton temps passé dehors n’est pas compté comme faisant partie de ta peine !)
    • Retour sur la mort de Mohammed au centre de rétention de Bordeaux il y a un mois suite à une overdose de médicaments. Les médocs sont massivement utilisés dans les CRA pour calmer la détention, comme en novembre 2019 à Vincennes où un prisonnier était déjà mort pour les mêmes raisons. C’est seulement parce que les autres prisonniers sont restés en grève de la faim plusieurs jours de suite que l’info est enfin sortie.

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  • Discussion avec Estrella –  Manifestation pour Jimony mort à la prison de Meaux – Appel de prisonniers du CRA du Mesnil

    Discussion avec Estrella – Manifestation pour Jimony mort à la prison de Meaux – Appel de prisonniers du CRA du Mesnil

    • Lettre d’une mère de prisonnier
    • Discussion avec Estrella, femme d’un prisonnier longue peine, notamment sur le confinement des prisons qui n’en finit pas.
    • Enregistrement de la manifestation et des prises de parole devant la prison de Meaux, lors du rassemblement du 7 février 2021 en hommage à Jimony Rousseau Sissoko.
    • Appel de prisonniers enfermés à la prison pour sanss-papiers du Mesnil-Amelot.

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    « Les décisions administratives refusant à une personne prisonnière de commander une revue ou de la détenir peuvent faire l’objet d’un recours administratif. »

    Règlement intérieur type, article 19, annexe de l’article R57-6-18 du Code de Procédure Pénale
  • Blocage à la Talau’ contre les parloirs hygiaphones – Mouvements de prisonniers et de proches en Italie

    Blocage à la Talau’ contre les parloirs hygiaphones – Mouvements de prisonniers et de proches en Italie

    Emission de l’Envolée du vendredi 23 Avril 2021
    • Témoignage d’un prisonnier qui sort de la Talaudière, la prison de Saint-Etienne, où, comme on vous l’avait raconté, le samedi 3 avril 2021, les prisonniers ont fait un blocage de promenade pour notamment exiger la fin des parloirs hygiaphones et obtenir plus de nourriture. L’envoi des ERIS a mis fin au blocage aux alentours de 21h. Au moins deux personnes, désignées comme meneuses, ont été envoyées au mitard. Un prisonnier sorti récemment de la Talaudière témoigne dans une vidéo sortie sur le blog « infos prison saint etienne », qui a aussi une page facebook.
    • Discussion avec G. autour de la situation dans les prisons en Italie depuis le premier confinement. Retour sur le mouvement de prisonnier-e-s et de proches qui a commencé début mars 2020 et qui a duré jusqu’à la fin de l’été et qui fait écho à la discussion qu’on a eu avec un copain italien autour des luttes menées par Santa Notarnicola (dans les deux émissions précédentes).

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  • Appel de l’intérieur d’une prison pour sans-papiers – Enfin une autopsie pour Taoufik mort à la prison de Perpignan

    Appel de l’intérieur d’une prison pour sans-papiers – Enfin une autopsie pour Taoufik mort à la prison de Perpignan

    • Lettres de Camille et d’un prisonnier de Bapaume.
    • Appel d’un prisonnier du centre de rétention de Mesnil Amelot en région parisienne.
    • Appel de l’oncle de Taoufik, mort à l’hôpital le 18 octobre 2020 alors qu’il était enfermé à la prison de Perpignan. Une autopsie vient enfin d’être ordonnée. Nous avions déjà reçu la soeur de Taoufik dans une émission précédente.
    • Discussion sur la loi Sécurité Globale adoptée cette semaine par l’Assemblée

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  • Peine à vie pour Philippe El Shennawy – Un surveillant démissionnaire de Saint Martin-de-Ré témoigne

    Peine à vie pour Philippe El Shennawy – Un surveillant démissionnaire de Saint Martin-de-Ré témoigne

    Emission de l’Envolée du vendredi 9 Avril 2021
    • Un appel de S. pour continuer de parler de Sante Notarnicola, militant anticarcéral italien récemment décédé (suite de l’émission précédente).
    • Retour sur la peine à vie subie par Philippe El Shennawy, libéré en 2014 après 38 ans de prison et toujours inquiété par les juges.
    • On discute autour du témoignage du surveillant démissionnaire à propos des violences pénitentiaires à Saint Martin de Ré, publié sur le site. Il revient notamment sur les violences commises par des matons dont nous avions parlé avec Oumou, la soeur de Sambaly, mort en 2016 à Saint Martin de Ré.
    • Brèves sur le Covid : Au CRA de Vincennes, des bâtiments sont fermés suite à un cas positif. Les parloirs ont été fermé. A Saint Étienne, des prisonniers ont bloqué la promenade pour demander, notamment, la suppression des plexis aux parloirs.

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  • « IL Y A LA LOI DU SILENCE »

    « IL Y A LA LOI DU SILENCE »

    Témoignage d’un ancien surveillant de la prison de Saint-Martin-de-Ré.

    L’Envolée a enquêté sur la prison centrale de Martin-de-Ré à la demande de Jean-Christophe Merlet, prisonnier qui a subi là-bas des violences de la part de surveillants pénitentiaires, et de la famille de Sambaly Diabaté, prisonnier mort entre les mains des surveillants de cette même prison.

    Nous avons interrogé un surveillant pénitentiaire démissionnaire. Une fois n’est pas coutume. Ce n’est en effet pas dans nos habitudes, mais l’utilité de ce témoignage pour les personnes concernées nous a convaincu qu’il était opportun de le publier. Pierrick Legendre répond ici à nos questions sur les violences commises par des personnels de Saint-Martin-de-Ré sur un prisonnier malade, Jean-Christophe Merlet, ainsi que sur les faits qui ont conduit à la mort de Sambaly Diabaté le 9 août 2016. Cet entretien dont nous publions ici quelques extraits met en lumière certains mécanismes qui régissent l’administration pénitentiaire et confirme, sans surprise, que les violences pénitentiaires sont systémiques. Le corporatisme et le silence y sont érigés en lois.


    Vous vous appelez Pierrick Legendre ; vous étiez surveillant pénitentiaire ?

    Oui, tout à fait : pendant vingt-trois ans, j’ai exercé dans la fonction publique auprès de l’administration pénitentiaire.

    Saint-Martin-de-Ré est une centrale que vous connaissez bien ?

    Oui, j’y étais de début 2000 à courant 2015, 2016. Puis suite à une sanction disciplinaire, j’ai été déplacé d’office sur la maison d’arrêt (MA) de Niort pendant deux années ; et je suis revenu à Saint-Martin en juillet 2017 avec déjà le projet de démissionner, ce que j’ai fait en novembre 2017. […]

    C’est aussi une prison qui a fait parler d’elle dans les années 2010 à cause d’une équipe de surveillants particulièrement redoutés – de la direction comme des prisonniers : l’équipe 4. Vous étiez surveillant là-bas à ce moment-là ?

    Oui. Effectivement, sous un premier directeur, on a eu pas mal de soucis avec une équipe de surveillants trop zélés qui avaient été nommés « droits dans leur bottes » par les syndicalistes qui ont pris parti pour eux à l’époque, et qui se trouvaient comme par hasard en permanence sur les interventions avec force et violence. On appellera ça comme on veut, mais c’était systématique. Mais ça ne fait pas partie des missions de provoquer les personnels féminins, et aussi  et particulièrement  la population pénale. […] Les piliers de l’équipe, sont partis tranquillement à la retraite. Mais il y en a qui ont été forgés à leur esprit. Ils ont fait tache d’huile, disons.

    Vous avez travaillé sous la direction de Mme Manaud-Bénazéraf ; c’était comment, de travailler sous cette direction ?

    Décevant, parce que tout le monde personnels et détenus était content de voir partir l’ancienne équipe de direction. Elle a repris la suite de M. Cheminée, mais ça n’a pas été un renouveau positif. Elle était pas beaucoup sur le dialogue non plus. Elle a pérennisé ce qui était en place sous l’ancienne hiérarchie.

    Vous connaissez Jean-Christophe Merlet ; vous étiez surveillant quand il était prisonnier à Saint-Martin. M. Merlet a été roué de coups par des surveillants en 2016 ; il a porté plainte, et vous avez accepté de témoigner.

    Oui, j’ai croisé M. Merlet sur les coursives quand j’exerçais du côté caserne. Concernant les violences sur M. Merlet, je n’étais pas présent ; par contre, j’ai pu constater des attitudes à son égard qui n’étaient pas particulièrement… on va dire que c’est quelqu’un qui n’était pas aimé de la direction ni des surveillants. On va dire qu’on a pas été très aidant avec ce détenu qui, du fait de son handicap, avait des problèmes pour se déplacer : il avait été placé au deuxième étage, sachant qu’il n’y a pas d’ascenseur. Rien que les déplacement quotidiens vers une infirmerie, une cour de promenade ou une cabine téléphonique lui posaient des soucis. Y avait sûrement plus judicieux.

    Ça, c’est de la responsabilité de la direction ?

    Oui, tout à fait. Et par le biais des infirmières, qui auraient pu en justifier la nécessité…

    A l’époque, la direction de l’établissement vous avait demandé des renseignements sur ce prisonnier ?

    Oui, ce personnage étant issu du milieu des motards, dont je suis moi-même assez proche, la hiérarchie a essayé de tirer le fil dans ce sens-là ; mais j’ai refusé, et ça c’est vite retourné contre moi, et contre lui après ma démission.

    Ça arrive souvent qu’une direction demande des renseignements à ses personnels en plus de tous les dispositifs d’écoute et de lecture des courriers ?

    Oui, ça se demande souvent ; officiellement, mais pas de manière écrite.

    M. Merlet a aussi porté plainte contre Mme Manaud-Bénazeraf pour des faits d’acharnement à son encontre, comme ceux que nous venons d’évoquer, et pour avoir couvert son personnel concernant les violences commises à l’encontre de M. Merlet.

    C’est sûr qu’elle est quand même actrice par le fait de diriger son personnel à l’époque. Mais en tant que directrice, le problème, c’est que c’est pas elle qui est sur le terrain : c’est des directives qui étaient données par la sous-directrice du quartier caserne, Mme D., c’est plutôt elle qui aurait la responsabilité, qui avait des courriers directement ; parce que Mme Manaud était numéro 1, et je sais pas si elle avait beaucoup de notions sur Merlet à l’époque.

    Y avait eu le passage à tabac, qui faisait tache.

    Pour elle, c’est un parmi d’autres ; c’est dramatique mais c’est comme ça. […]

    Pour Jean-Christophe Merlet, son tabassage est prémédité.

    Sans certitude aucune, mais il y a eu un incident ce jour-là entre le personnel et Merlet sur un litige d’ailleurs un peu sombre, ou trouble. En revanche, la proximité entre M. Merlet et M. Diabaté, et certaines prises de positon qu’il a pu avoir, ont pu irriter ; et peut-être qu’il y a eu un surdosage d’agressivité de la part de certains personnels.

    Selon Jean-Christophe Merlet, si les surveillants leur en ont voulu, à lui et à Sambaly Diabaté, c’est en rapport avec des histoires de trafic…

    C’est probable. Quand il y a trafic entre un personnel et des détenus, le problème, c’est pourquoi on commence à balancer l’autre, et qui a balancé qui… parce que normalement, ça arrange bien tout le monde : le détenu est content d’avoir ce qui rentre, et le personnel est content d’avoir le retour du trafic. Mais certainement qu’il y en a eu. […] Moi, j’étais dans le collimateur aussi, parce que mes connaissances communes avec M. Merlet gênaient, et mes prises de position par rapport à l’inconfort dans lequel il était mis gênaient aussi. Ils auraient bien aimé que ce soit moi, sur le trafic ; je sais que j’ai eu le téléphone sur écoute un moment, mais ça a rien donné.

    Comment ça s’est passé quand vous avez été interrogé pour M. Merlet ?

    J’ai été convoqué à la gendarmerie. Ils sont très conscients de la problématique pour M. Merlet, ils ont pris note qu’il y avait eu des manquements et que certaines personnes avaient essayé de mettre des zones d’ombres et qu’on a positionné des lampistes à certaines places pour essayer d’adoucir la responsabilité de certaines personnes qui sont relativement intouchables ; et il y a la loi du silence…

    [Ndlr : Lampiste = subalterne au poste le plus modeste, à qui on fait souvent endosser injustement les responsabilités]

    Quand vous dites : « Il y a la loi du silence »… le corporatisme est très fort, les personnels se couvrent et il est impossible d’avoir des preuves ou de les récupérer quand il y a ce genre d’altercation. C’est parole contre parole, et on sait que la parole d’un prisonnier ou de sa famille ne vaut pas lourd face à la parole de surveillants…

    Il faut savoir que les personnels ont un code de déontologie concernant le secret professionnel. On n’a pas le droit de communiquer des informations concernant ce qui se passe à l’intérieur des prisons. Fondamentalement, quand on fait un peu opposition aux pratiques de l’administration et qu’on remet en cause ces choses-là, on s’expose à des sanctions en interne ; on essaie de faire pression sur les personnels pour acheter la tranquillité du système.

    Les directions couvrent leurs personnels ?

    Si on ne couvre pas, on en assume aussi les conséquences, donc en fait c’est pas qu’elles couvrent leur personnel, c’est que les manquements de ces personnels, on va forcément leur en imputer une part de responsabilité, alors…

    Prisonnier à Saint-Martin, Sambaly Diabaté est mort le 9 août 2016 d’une asphyxie, suite à l’intervention de surveillants. Vous en avez entendu parler en interne ?

    Oui. Même n’ayant plus de carte ni de mandat syndical sur la fin de mon exercice, j’avais encore beaucoup d’informations qui me remontaient parce que j’essayais encore de défendre un peu les personnels. L’affaire Diabaté, j’en ai donc entendu parler en interne par des collègues qui se sont confiés. J’étais pas là, mais je sais qui était à quel endroit, et les choses qui auraient pu être cachées, et les tentatives pour se défausser des gestes qui ont été faits, et qui n’auraient pas dû. Je sais par des conversations qui ont été tenues dans des bureaux par du personnel que le début de l’intervention part d’une altercation dans le bureau de G., premier surveillant. Ce personnel est un gradé de service, il est premier surveillant, il est pas juste surveillant, donc il gère l’équipe ce jour-là en détention. Ce que je sais, c’est que le problème part d’un entretien entre le détenu Diabaté et ce premier surveillant, où le détenu Diabaté a mordu la main de ce personnel gradé. S’ensuit tout ce qu’on sait derrière, ou pas. En tout cas, l’intervention en question sur le détenu, les personnels qui étaient là ce jour et qui ont vécu la situation se demandaient pourquoi G. en a pas parlé… Après tout, quand on se fait mordre, y a rien de mal à avoir mis un coup en retour. Ça reste de la légitime défense. Si on se fait mordre une main, qu’on pousse la personne ou qu’on mette une gifle, qu’importe ; ça reste un droit.

    Le surveillant G. n’a donc rien dit, et ne figure même pas dans la procédure.

    Oui, alors qu’il devrait y figurer, mais il y a eu un flou artistique sur le pourquoi du décès. Ils savaient pas de quel manière le décès avait eu lieu ; on sait maintenant que c’est par asphyxie.… mais à ce moment-là, la question était : « Est-ce que c’était suite à une commotion due à ce coup-là ou à un autre ? »… Parce qu’apparemment, y en a pas eu qu’un… Il y a un collègue à qui on reproche d’avoir porté un coup au sol alors qu’il est arrivé dans les derniers et qu’a priori, il a même pas touché au détenu. Actuellement révoqué, il est en demande de réhabilitation puisque les langues se sont un peu déliées en garde à vue ; les gens sont revenus sur leurs propos.

    Pendant les gardes à vue qui ont lieu bien plus tard, c’est ça ?

    Oui, parce que la police est pas idiote non plus ; y a un moment, quand les gens sont un peu trop précis, à la virgule près, ils se disent : « Bon… »

    « Un détenu qui a été menotté dans le dos avec un bâillon dans la bouche, positionné au sol dans un camion, à plat ventre avec une, voire plusieurs personnes sur le dos pour l’immobiliser. Voilà exactement ce qui c’est passé. »

    Les dépositions étaient identiques, vous voulez dire ?

    Oui c’était du copié-collé, manipulé, téléphoné, ce qu’on veut, et dans ces cas-là, on se doute bien qu’il y a quelque chose à cacher ; et en plus, malheureusement il y a eu deux suicides. Bizarrement, ces deux personnes qui se sont donné la mort se trouvaient sur cette intervention-là, et ils étaient tous les deux mis en examen. Il y a fort à parier qu’il y a un effet de cause à conséquence. Pour ceux qui étaient là ce jour-là… ils ont peu de choix : soit aller dans le sens des collègues et prendre les mêmes risques, soit dire la vérité et se mettre tous les collègues à dos, et même une partie de la hiérarchie.

    Pendant cette intervention, Sambaly Diabaté était bâillonné.

    Oui, ça c’est sûr ; ce qui a été clairement défini, c’est qu’il y a eu un bâillon de positionné et que le détenu est mort asphyxié. C’est M. R. qui l’a bâillonné, il l’a déclaré aux forces de l’ordre ; mais bizarrement, il est toujours en activité. Donc on a transporté du bâtiment caserne au quartier disciplinaire (QD), à la citadelle, un détenu qui a été menotté dans le dos avec un bâillon dans la bouche, positionné au sol dans un camion, à plat ventre avec une, voire plusieurs personnes sur le dos pour l’immobiliser. Voilà exactement ce qui c’est passé. Ce qui est marrant, c’est que des personnes présentes sur l’intervention occupaient des postes qui ne justifiaient pas leur présence sur les lieux, mais ils n’ont pourtant jamais été inquiétés. Il y un personnel connu de tout le monde qui a encore défrayé la chronique dernièrement, […] et qui connaît beaucoup de monde au niveau de la direction régionale. Lui, il était au poste de surveillance des promenades, poste qu’il ne devait pas quitter, car il y a au bas mot entre 80 et 130 détenus sur la cour de promenade ; pourtant, il a participé à l’intervention, ce qui a été relevé par tout le monde, et ça n’a inquiété aucune personne de l’administration de savoir qu’une personne qui ne devait logiquement pas avoir accès à l’intervention puisqu’elle était en poste et qu’on ne peut quitter ce poste sans relève… il n’a pas été inquiété. […] Pour avoir tenu le poste de surveillant de promenade, je sais que sur les horaires où il y a des détenus sur la promenade, il faut savoir que rien que pour des commodités d’ordre personnel il faut demander à un collègue de venir prendre le poste.

    Quand on vous apprend les techniques d’immobilisation, vous le savez, que le bâillon c’est interdit ?

    Oui, ça ne doit pas être pratiqué. C’est officiellement stipulé. Même les strangulations sont proscrites. Il y a une formation technique « intervention et menottage » une fois par an. C’est un peu sommaire et redondant, mais tout le monde y passe – au même titre qu’au stand de tir, où on répète aux agents le droit d’usage d’ouverture du feu, les circonstances, sur quel commandement, etc. D’ailleurs, dans l’affaire Diabaté, les reproches qui sont aussi faits à la première surveillante, c’est de ne pas avoir géré son intervention et d’avoir laissé faire des gestes interdits. Elle aussi, elle a fait deux tentatives de suicide.

    A quel moment et au bout de combien de temps vous considérez qu’une personne est immobilisée ?

    Tout dépend de la personne. L’objectif, c’est de neutraliser le détenu avec l’usage strictement nécessaire de la force. En Allemagne et aux Etats-Unis, je crois que le placage au sol avec menottage dans le dos et pression est proscrit justement parce qu’il y a des risques d’étouffement et de malaise cardio-vasculaire. […]

  • Lettres du QI – Appels de l’intérieur des prisons pour sans papiers – Hommage à un compa italien décédé

    Lettres du QI – Appels de l’intérieur des prisons pour sans papiers – Hommage à un compa italien décédé

    Émission de l’Envolée du vendredi 3 Avril 2021
    • Lettres de l’Infâme et de Fabrice
    • Appel de prisonniers enfermés au centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot
    • Appel de prisonniers du CRA de Vincennes
    • Appel d’un camarade italien pour rendre hommage à Sante Notarnicola, décédé récemment en Italie, ayant participé entre autre aux mouvements de prisonniers au début des années 70.

    L’Envolée est une émission pour en finir avec toutes les prisons. Elle donne la parole aux prisonniers, prisonnières et leurs proches & entretient un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur des prisons de toute sorte. L’Envolée est aussi un journal d’opinion de prisonniers, de prisonnières et de proches.

    Direct chaque vendredi de 19 à 20h30 sur FPP 106.3 en région parisienne et MNE 107.5 à Mulhouse, RKB 106.5 en centre-Bretagne lundi à 22h, PFM à Arras et alentours 99.9 mardi à 21h30, jeudi à 17h30 à Toulouse sur Canal Sud 92.2,et sur les webradios Pikez (dimanche à 11h) et Station Station (lundi à 13h). Podcasts disponibles sur toutes les plateformes.

    Pour nous joindre : 07.52.40.22.48 (WhatsApp, Telegram, Signal, appels et textos). Pour écrire : Radio FPP – L’Envolée, 1 rue de la solidarité, 75019 Paris, ou encore à contact@lenvolee.net et sur instagram, twitter, facebook & snapchat.

    L’abonnement au journal est gratuit pour les prisonniers et les prisonnières. C’est les abonnements du dehors le permettent.
    La censure qui frappe le numéro 52 ne concerne « que » ce numéro-là en détention. Contactez-nous !

  • Autour du projet de réforme de la justice / Retour sur les marches du 20 mars / Procès du CRA du  Mesnil-Amelot

    Autour du projet de réforme de la justice / Retour sur les marches du 20 mars / Procès du CRA du Mesnil-Amelot

    Émission de L’Envolée du 27 mars 2021


    On commence l’émission par un hommage cousu main à notre ami Olivier, cofondateur de L’Envolée qui est mort le 28 mars 2020. Un an qu’il est parti Zé, juste avant le grand enfermement ! Lui qui en combattait les germes depuis des années… Un an qu’il nous manque, Oliv’. Dans les extraits choisis, il nous parle de transmission et rappelle qu’il y aura toujours du baston dans la taule et ailleurs. 

    Nouvelles de la semaine

    • Retour avec K sur la marche contre les violences d’État et contre le racisme à Paris, organisé par le réseau d’entraide Vérité & Justice.
    • Soin et prison : dans sa chronique mensuelle, Coco rappelle les droits fondamentaux auxquels les prisonniers et les prisonnières ont droit ; appel à témoignage. 
    • Alex revient sur le procès des prisonniers du CRA du Mesnil Amelot.

    Invité de la semaine : Sébastien Delorge, avocat au barreau de Toulouse.

    Discussion au long cours à propos du projet de réforme de la justice annoncé par Super-Dupond-Moretti, ministre des tribunaux et des prisons, notamment la refonte des crédits de réduction de peine. On démonte le discours de l’ancien avocat devenu ministre, meilleur ami des matons et surtout joker de Macron dans la course démagogique et sécuritaire à la présidentielle. On revient aussi sur les parloirs hygiaphones à Seysses.

    L’Envolée est une émission pour en finir avec toutes les prisons. Elle donne la parole aux prisonniers, prisonnières et leurs proches & entretient un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur des prisons de toute sorte. L’Envolée est aussi un journal d’opinion de prisonniers, de prisonnières et de proches.

    Direct chaque vendredi de 19 à 20h30 sur FPP 106.3 en région parisienne et MNE 107.5 à Mulhouse, RKB 106.5 en centre-Bretagne lundi à 22h, PFM à Arras et alentours 99.9 mardi à 21h30, jeudi à 17h30 à Toulouse sur Canal Sud 92.2,et sur les webradios Pikez (dimanche à 11h) et Station Station (lundi à 13h). Podcasts disponibles sur toutes les plateformes.

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  • Compte-rendu du procès des mutins d’Uzerche

    Compte-rendu du procès des mutins d’Uzerche

    Au tribunal de Nantes le 22 février 2021

    Le 22 mars 2020, quelques jours après le début du premier confinement, une mutinerie a éclaté au centre de détention d’Uzerche. Les détenus des bâtiments C et D se sont révoltés, ils sont sortis de leurs cellules et ont éclaté les portes et les grilles. Certains sont montés sur les toits, d’autres ont envahi des zones habituellement interdites aux prisonniers, incendié les bureaux administratifs et des postes de contrôle. Les matons se sont enfuis et les prisonniers ont tenu la taule pendant une dizaine d’heures avant que les Eris ne la reprennent violemment, appuyés par des forces de police des alentours, dont le PSIG. Les prisonniers ont clairement donné les raisons de cette mutinerie dans un communiqué de revendication : face à la gestion calamiteuse de la pandémie en détention, ils réclamaient les mêmes moyens de protection contre le virus qu’à l’extérieur, d’autant que leurs conditions de détention les exposent à un risque accru. Ils exigeaient aussi d’être clairement informés de l’impact des mesures sanitaires sur le fonctionnement de la détention : parloirs, activités, promenades, cantines, etc. Cette révolte et les suivantes ont finalement obligé le gouvernement à réagir –  très timidement, et principalement par des déclarations aux médias.

    En répression de cette révolte, et aussi du fait que des bâtiments sont inutilisables, 336 prisonniers ont été transférés aux quatre coins de la France, et depuis juin 2020, les procès s’enchaînent : il y a 53 inculpés pour 14 procès différents. Certains ont déjà eu lieu, à Limoges, Evreux, Chartes, Mont-de-Marsan, Tulle ou Agen. Même s’il y a quelques relaxes, les peines sont lourdes : la plupart du temps, d’un à trois ans de prison. C’est la stratégie du ministère public : pas question de faire un grand procès de la mutinerie où l’administration pénitentiaire et son ministère de tutelle risqueraient de se retrouver sur la sellette. Vu les conditions de détention imposées aux prisonniers pendant le premier confinement, on préfère juger individuellement et distribuer des condamnations pour dégradations, destructions ou violences dans le plus grand silence médiatique.

    Le 22 février 2021, trois prisonniers inculpés pour la mutinerie passaient en procès au tribunal de Nantes – presque un an après les faits. Un quatrième, également transféré à Nantes, a été relâché depuis ; il sera jugé plus tard à Bordeaux. Des jugements individuels …pour des actes que les procureurs s’acharnent pourtant à désigner comme collectif aux procès.

    Nous étions quelques-un.e.s aux procès, pour tenter de soutenir par nos regards et nos rires les accusés qui comparaissaient comme détenus, et donc encagés dans un box de Plexiglass.

    Deux des inculpés ont comparu sans avocat malgré leur demande. La juge a savamment feinté en disant : « on va statuer là-dessus » – sans préciser qu’il s’agissait de statuer sur un renvoi, ce qui ne se fait pas à la demande des inculpés, et débouche sur une décision sans appel. Les juges n’avaient plus qu’à rejeter ce renvoi au prétexte que le droit de demander un avocat est inscrit sur la convocation et qu’ils n’avaient qu’à prendre leurs dispositions… alors qu’ils avaient bel et bien demandé à être défendus. Le procureur a pour sa part insisté sur la nécessité d’« aller vite ».

    Les trois étaient sensiblement accusés des même faits : des dégradations, des destructions et des violences sur dépositaires de l’autorité publique avec plus de huit jours d’ITT. Le tout assorti de circonstances aggravantes : la cour s’est servie de comptes rendus d’incidents pour présenter les faits comme des récidives. Il ressort pourtant des débats que contrairement à un détenu atteint à la gorge par une balle en caoutchouc, aucun maton n’a été blessé, puisqu’ils se sont enfuis dès le début. En fait, les ITT sont consécutives à un « choc psychologique et émotionnel  très important ». Bien sûr ! C’est de grands sensibles… surtout quand il faut charger les accusés.

    On a vite appris que les accusations sont basées sur des vidéos, celles des caméras de surveillance et d’autres trouvées sur les réseaux sociaux, et sur des témoignages de matons. Ils étaient une vingtaine à se porter partie civile, en plus du centre de détention, du trésor public et de …la Sodexo, sinistre entreprise d’hôtellerie et de restauration qui fait son beurre dans le bizness de l’enfermement.

    Après le rappel des faits, la juge  a enchaîné sur le visionnage de l’extrait d’une vidéo trouvée sur Facebook, histoire de se mettre dans l’ambiance. On n’y voit guère qu’un peu de bordel en coursive et des prisonniers en train de goûter un peu de liberté : quelques dizaines marchent sur des pelouses qui leur sont interdites, d’autres se servent des lances à incendie… On est loin des ravages décrits ici et là, Mais apparemment, c’était déjà trop pour les juges. Sur le contexte, sur le Covid-19 en prison… pas un mot.

    A la juge qui demandait si la lecture des dépositions de leurs dépositions les ennuyait, un des accusés répond qu’ils sont enfermés dans les geôles du tribunal depuis 10 h 30. Faut dire qu’il est alors pas loin de 19 heures…

    Le premier accusé, A, reconnait les faits de dégradation. Avant la destruction des caméras de surveillance, il a été filmé en train de défoncer une porte avec un chariot. Il reconnaît s’être introduit dans le bureau du chef de détention mais maintient qu’il n’est pas monté sur les toits et n’a croisé aucun maton. Il nie donc les violences et les destructions, n’ayant également pas participé aux incendies. Il reconnait avoir cassé une grille, puis érigé une barricade. Ayant déjà participé à un mouvement, il savait comment ralentir les Eris qui n’ont pas tardé à débouler.

    Il explique que les prisonniers ont décidé de tout casser lorsqu’ils se sont aperçus qu’ils se faisaient tirer comme des lapins par les Eris à coups de balles en caoutchouc. A la question de la juge : « Mais ils auraient dû faire quoi, les Eris, attendre que ça se calme ? », visant à justifier les tirs, il répond : « Oui, ça aurait été mieux : on était désarmés, nous. » Il était à ce moment-là auprès du prisonnier touché à la gorge dont il n’a cessé de s’occuper. Il a l’air d’en avoir gros sur la patate de la détention et de ce procès. Loin de démentir la juge et les matons qui le désignent comme un meneur, il assume sans se laisser démonter.

    B, le deuxième accusé, n’a que 21 ans, et il est libérable fin Mars. Il est inculpé sur la foi d’une vidéo Snapchat qui ne figure d’ailleurs au dossier que par quelques copies d’écran et de témoignages de matons qui l’identifient. Le soir même de la mutinerie, ceux-ci se sont en effet escrimés à éplucher les vidéos en ligne pour identifier des prisonniers – de façon plus ou moins approximative vu leur qualité. Sur celle-ci, on voit B. dans un couloir, en train de faire un signe. Il explique qu’il n’a rien fait de plus. Il est resté dans sa cellule et il n’est sorti que dans son couloirau moment où une personne filmait. Il a alors fait un signe « pour faire sont intéressant ». Les matons prétendent le reconnaître à un autre moment, en train de donner des coups de pied dans une porte, ce qu’il nie. Décidément, il n’y a rien dans le dossier. B. profite de son passage au micro pour dénoncer quelques faits. Alors que le procureur a dit qu’il n’y a eu aucune sanction disciplinaire suite au mouvement (comme si le transfert n’en était pas déjà une), il rétorque qu’il a passé deux mois au quartier des arrivants lors du transfert à Nantes, une façon de l’isoler, et que les matons de Nantes « lui font la misère ». Sa cellule est fouillée tous les deux jours et il se prend des réductions de crédit de remise de peine pour des motifs aussi fumeux que la possession de feuilles de papier a cigarettes…

    Le dossier de C., le troisième prévenu, est encore plus mince. Sur la vidéo Facebook, on le voit juste rigoler avec quelques autres détenus dans un couloir. C’est tout. Lui explique que quand il a vu le bordel, il a surtout pensé à protéger ses affaires pour éviter les vols. Il se dit très déçu que les matons se soient enfuis dès le début : « S’il se passe quelque chose, il n’y a personne pour nous protéger ! » Et surtout, « ceux qui sont censés faire respecter la loi ne la respectent pas eux-même : lors du transfert à Nantes, j’ai perdu la moitié de mes affaires. Ils m’ont volé la moitié de mon paquetage !»

    D’autant moins bavards qu’ils ont déjà fait une déposition en garde à vue et que leur journée a déjà été longue, tous trois refusent de parler d’autre chose que de ce qu’ils ont eux-mêmes fait ou pas : « On va pas tout vous raconter non plus, on est pas des journalistes ! »

    Le procureur tire de sa manche un arrêt de la cour de cassation pour tenter de persuader les juges que la seule présence des prévenus sur les lieux de la mutinerie en fait des coupables. Il épluche ensuite tout leur casier judiciaire et jusqu’au moindre compte-rendu d’incident en détention possible pour les dépeindre comme de dangereux criminels sans foi ni loi… mais à part ça, il n’a pas grand-chose. Il tente de prévenir la plaidoirie de l’avocat en prédisant qu’il dénoncera sûrement les conditions de détention d’une institution pourtant « sacralisée », dont le personnel « fournit un travail exemplaire ». Qu’est-ce qu’il faut pas entendre ! Il requiert  trois ans ferme et cinq ans de privation de droits civiques et de famille pour A : « C’est un meneur, il l’assume, alors il n’aura pas de problème à assumer ça aussi ! » Pour B, il demande deux ans ferme et cinq ans d’interdiction de port d’arme et neuf mois ferme et cinq ans d’interdiction de port d’arme pour C.

    L’avocat de A rappelle enfin le contexte de l’épidémie en prison. Il lit le communiqué des mutins pour rappeler le sens de cette révolte et dénonce l’éparpillement de petits procès visant à éviter de mettre en lumière le problème de fond du Covid-19 en prison et les manquements des autorités. « S’il fallait aller vite, faire un procès collectif aurait été bien plus efficace, plutôt que des procès éclatés un peu partout ! » Il souligne que les conditions de détention déjà dures ont encore été dégradées par les mesures sanitaires en prison. Puisqu’on ne juge pas une mutinerie, les accusés ne peuvent être poursuivis sur cette base, et doivent donc encourir les mêmes peines que pour des faits similaires accomplis individuellement à l’extérieur. Le déroulé des faits juxtapose des scènes distinctes sans lien entre elles ; contrairement au procureur, l’avocat y voit une preuve qu’il n’y a pas de « coaction » de son client dans les faits de destruction et de violence. Il relève l’absence des parties civiles. Même l’avocat des matons – qui s’est déplacé aux quatre coins de la France pour les autres procès – n’est pas là. Et puis les dommages sont extrêmement flous : on lâche le chiffre exorbitant de 2,4 millions d’euros, sans aucun détail. L’avocat demande donc la relaxe de son client pour les faits de destruction et de violences et une peine d’un an au plus pour les quelques dégradations assumées.

    Lors de leur dernière prise de parole, B et C disent leur dégoût : ils n’ont rien fait, ils n’ont pas d’avocats pour les défendre et ils risquent de lourdes peines. « Si j’avais fait quelque chose, neuf mois, je serais content ! Je suis en train de me dire que même quelqu’un qui a rien fait, il prend une peine ! »

    Après délibération, les juges prononcent la relaxe pour B et C. A prend un an ferme et cinq ans d’interdiction de port d’arme pour les dégradations. Pour une fois, comme il n’y avait vraiment rien dans le dossier, les juges n’ont pas suivi le procureur. Mais une chose est sûre : d’autres procès viendront, même s’il n’y a pas beaucoup d’informations là-dessus. Sans doute encore sans avocats ni soutiens extérieurs, comme cette fois-ci. Une justice d’abattage soucieuse de couvrir les actes de ceux à qui elle envoie tous les jours de la chair à prison. La juge a d’ailleurs éprouvé le besoin de se fendre d’une petite déclaration à la fin : « Nous n’avons pas jugé de la légitimité d’une révolte ; nous n’avons jugé que les faits. »

    Circulez, y a rien à voir.

    L’Envolée et Casses-Murailles (émission de radio anticarcérale,
    à écouter à Nantes, sur Jet FM-91.2 tous les dimanche à midi et minuit)