Étiquette : justice

  • Craquage aux Baumettes – Refus de soins à Poitiers-Vivonne – La censure de l’Envolée par l’AP au tribunal – la BAC à la barre

    Craquage aux Baumettes – Refus de soins à Poitiers-Vivonne – La censure de l’Envolée par l’AP au tribunal – la BAC à la barre

    Émission de l’Envolée du vendredi 4 octobre 2024

    • Une lettre de Bambina du centre de détention pour femmes des Baumettes à Marseille où elle est arrivée après 8 transferts. Elle revient sur le stress quotidien et les refus de soin (alors qu’elle est diabétique), qui poussent à bout et détruisent la santé. Et quand elle a récemment craqué, deux fois sauvées par des codétenues, l’AP n’a réagi qu’en la réprimant encore davantage en la renvoyant en régime fermé.
    • Des nouvelles d’Aurélie dont on lit une lettre à l’antenne. Elle annonce son départ pour le CNE en fin d’année et revient sur l’arbitraire des matons à Poitiers-Vivonne et raconte quand le médecin lui annonce un RDV en urgence pour … dans un mois (on peut retrouver plusieurs de ses lettres dans nos dernières émissions et les derniers numéros du journal). Elle dit aussi qu’un prisonnier s’est encore suicidé au quartier homme.
    • On parle de l’audience à venir au tribunal administratif de Paris le vendredi 11 octobre prochain dans le cadre des plaintes et des censures de l’administration pénitentiaire contre l’Envolée. On en profite pour revenir sur les raisons des censures de notre journal ces dernières années et la censure que subissent les prisonniers et les prisonnières au quotidien (on avait consacré un numéro du journal aux censures de l’AP qu’on peut relire ici).
    • Retour sur le procès de deux flics de la BAC du 93 qui avaient tiré sur Nordine et Meryl, qui a perdu le bébé qu’elle portait. Juste après, Nordine était condamné à deux ans ferme pour refus d’obtempérer, la peine maximum. Pour les deux keufs, le procureur a requis un an avec bracelet.

    L’Envolée est une émission radio pour en finir avec toutes les prisons. Elle donne la parole aux prisonniers, prisonnières et leurs proches & entretient un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur des prisons. C’est aussi un journal d’opinion de prisonniers, de prisonnières et de proches.

    L’abonnement au journal est gratuit pour les prisonniers
    et les prisonnières.

    Direct chaque vendredi de 19h à 20h30 sur FPP 106.3 en région parisienne !
    Rediffusions sur MNE 107.5 à Mulhouse, RKB 106.5 en centre-Bretagne lundi à 22h, Radio Galère 88.4 à Marseille le jeudi soir à 20h30, PFM à Arras et alentours 99.9 mardi à 21h30, Canal Sud 92.2 jeudi à 17h30 à Toulouse, L’Eko des Garrigues 88.5 à 12h le dimanche à Montpellier, Radio U 101.1 le dimanche à 16h30 à Brest, Radio d’Ici 106.6 à Annonay mardi à 21h30 et 105.7 FM & 97.0, à Saint-Julien-Molin-Molette dimanche à 20h, Radio FM 43 dimanche à 12h en Haute-Loire, 105.7 FM au Chambon-sur-Lignon, 102 FM à Yssingeaux et 100.3 FM au Puy-en-Velay, sur Radios libres en Périgord, en Dordogne,102.3 FM à Coulounieix-Chamiers jeudi à 20h, sur Radio Alto 94.8 FM sur le massif des Bauges jeudi à 21h, sur Jet FM 91.2FM à Nantes le lundi à 12h, et sur les webradios Pikez (dimanche à 11h) et Station Station (lundi à 13h).
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    Pour nous joindre : 07.53.10.31.95 (appels et textos).
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  • Blanche parle de la censure du courrier – 36 transferts pour Nathan – « Chronique de l’injustice ordinaire » avec Ana Pich – Marche nationale contre les violences d’état

    Blanche parle de la censure du courrier – 36 transferts pour Nathan – « Chronique de l’injustice ordinaire » avec Ana Pich – Marche nationale contre les violences d’état

    Émission de l’Envolée du vendredi 8 mars 2024

    • Une lettre de Blanche qui parle de l’importance des correspondances et des galères que lui fait le vaguemestre en retenant son courrier. L’occasion de causer du droit de censure de l’administration pénitentiaire et de son impact sur les liens et les difficultés à dénoncer ses conditions d’enfermement.
    • Une lettre de Nathan où il revient sur son parcours carcéral et raconte la façon dont l’administration pénitentiaire essaie de le « gérer » à coup de dizaines de transferts disciplinaires (36!) en ne le laissant jamais plus de trois mois dans une taule et en le maintenant à l’isolement depuis 4 ans et demi.
    • On reçoit Ana Pich pour discuter de sa bande dessinée « Chronique de l’injustice ordinaire » où elle raconte des audiences de comparution immédiate et les années de prison que les juges y distribuent. Elle dénonce les violences judiciaires – jugements expéditifs, mépris de classe, racisme et sexisme – qui s’exercent quotidiennement et en toute impunité au sein des tribunaux.
    • Fatou et Isaac du réseau « Entraide vérité et justice » nous appellent pour parler de la marche nationale annuelle contre les violences d’état et le racisme systémique qui a lieu le 16 mars prochain à Paris, Toulouse, Rennes, Grenoble, Bruxelles, Bordeaux, etc. (vous pouvez retrouver toutes les infos sur la page FB du réseau ici). On discute des origines du réseau et de cette marche annuelle organisée par les premières personnes concernées. Extrait de l’appel : « Le Réseau d’Entraide Vérité et Justice appelle à marcher le 16 mars 2024 avec les familles de victimes et les survivant·es des violences policières, pénitentiaires, psychiatriques et judiciaires contre l’impunité de ces violences, contre les propos, actes, violences et crimes racistes, xénophobes, homophobes, sexistes. Nous marcherons ensemble pour la mémoire des victimes défuntes et l’honneur des survivant·es de l’État policier et judiciaire. »

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  • « Cette situation n’est pas due à un “manque de moyens”, mais à l’idéologie des magistrats »

    « Cette situation n’est pas due à un “manque de moyens”, mais à l’idéologie des magistrats »

    Envoyée à une mauvaise adresse, cette lettre de Daniel datée de juillet 2021 ne nous est parvenue qu’en octobre ; dommage, car ces réflexions et analyses limpides ont toute leur place aux côtés des lettres publiées dans le livre La peine de mort n’a jamais été abolie. Où commence la barbarie d’une peine ?, interroge Daniel. Il pose aussi la question de l’opportunité d’entamer une bataille juridique en déposant des requêtes à la commission de Strasbourg sur la notion de « peine inhumaine ».

    Par ailleurs, cette lettre nous arrive de Ensisheim ; on en profite pour rappeler que l’émission est désormais écoutable dans cette centrale d’Alsace sur les ondes de Radio MNE à Mulhouse. Merci à l’équipe !

    Maison centrale d’Ensisheim,

    le 5 juillet 2021,

    Bonjour aux Envoleurs (de L’Envolée),

    Je devais vous écrire, il y a longtemps déjà, mais bon, mieux vaut tard que jamais, alors voici.

    Un soir (sur je ne sais quelle station), il y a quelques mois, j’écoute (un bref instant) telle personne du monde libertaire (!) qui raconte qu’un jour il eut connaissance quel tel perpète était encore en taule après une quarantaine d’années où on l’y avait oublié. Il termina en précisant que si l’on avait donc aboli la peine de mort en France « pour mettre ça à la place (des quarante ans de cage), ce n’était pas la peine ».

    Ailleurs et jadis, Badinter aurait déclaré que s’il avait su alors que la perpète deviendrait sans fin, il aurait fixé une limite à cette peine de barbare.

    Il y a une quinzaine d’année (voire plus), j’ai tenté une requête à la Commission européenne des droits de l’homme (sic) à Strasbourg visant tel article de la convention (sic) selon lequel : « nul ne peut être condamné à un traitement ou une peine inhumaine ». Je posais ainsi la question gênante : est-ce que garder trente années et plus quelqu’un en taule est une « peine humaine » ? On ne pouvait que répondre : NON ! Aussi, ma requête a été rejetée (sous tel prétexte). Une amie de Suisse a tenté alors une même requête ; celle-ci a été évidemment rejetée aussi (sous tel ou tel prétexte).

    Octobre prochain : quarantième anniversaire de l’abolition de la peine de mort en France (un siècle après le Portugal). On peut d’ores et déjà s’attendre à de forts méchants « débats » (truqués) où tel ou tel invité choisi réclamera le retour « immédiat » du coupage de tête ou de la taule à vie pour tous.

    Ma question sera alors la suivante : est-ce que vous seriez partant en tant qu’association pour tenter une requête à ladite commission de Strasbourg sur la notion de « peine inhumaine » ? Si l’OIP, l’Arapej, le Genepi et autres pouvaient s’associer à la démarche.

    Jadis, j’avais écrit à la Commission nationale consultative des droits de l’homme à Paris qui m’avait répondu que ce n’était pas à eux de s’occuper du sujet mais au contrôleur général des prisons… Mme Hazan, que j’avais alors contacté, m’avait fait savoir qu’elle avait parlé du sujet dans son rapport annuel, mais tout le monde sait l’impact en France de ce type de rapport… En début d’année 2021, j’ai écrit au même sujet à Badinter, à Dupond-Mor (deux fois), à sa porte-parole (Mme É. Masson) : aucune réponse de personne (sujet gênant ou courrier pas lu, ou…)

    À noter aussi que, sur ce sujet, tout le monde ment. Les Dernières Nouvelles d’Alsace par exemple déclarent qu’on (les perpètes) sortiraient de taule après 19 années, tel magistrat (à la télé, radio et autre) affirme que l’on sort tous après 22 ou 25 années de taule. Quand je suis arrivé dans ce camp, les perpète sortaient en général après 16 à 19 années de taule. De nos jours, après 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36… années (la plupart avaient 15 ans de sureté) et « 36 repassages » au centre national d’évaluation (sic). On est encore en cage. Si ça, c’est pas des peines barbares, qu’est-ce que c’est ?

    En France, à l’heure actuelle encore, il est interdit de se réinsérer. La preuve par les chiffres : près de 80 % des demandes de conditionnelle (moyennes, longues et trop longues peines) sont refusées. Cette situation n’est pas due par exemple à un « manque de moyen » (ou autre refrain) comme le croit et l’écrit l’analyse parue en mai dernier dans l’article du Monde diplomatique « Une justice au bord de l’implosion » (sic) mais cela est dû à l’idéologie à laquelle adhèrent les refuseurs. Le phénomène n’est pas nouveau, Badinter signale je ne sais plus où cette adhésion massive des magistrats à telle idéologie pour la période 39-45…

    Bref, je vous remercie de votre attention, recevez mes salutations.

    Daniel Dolard

  • Morts en prison – la justice protège la police –  Appel du CRA de Vincennes

    Morts en prison – la justice protège la police – Appel du CRA de Vincennes

    Émission de l’Envolée du Vendredi 19 Novembre 2021
    • Lettre de Libre Flot depuis le QI de Bois d’Arcy, qui nous envoie aussi une petite fiche de lecture du livre « Pour elles toutes »

    • Retour sur la mort de Gordana en détention, alors que le seul médecin présent sur la détention ne lui a accordé qu’un diagnostic téléphonique juste avant son décès et en dépit des appels des autres prisonnières

    • Retour sur le procès de Mélanie : la justice protège les policiers, avec Christian, soutien du Réseau d’Entraide Vérité et justice

    • Appel d’un prisonnier du CRA de Vincennes pour parler des conditions de vie dégradantes dans cette prison pour sans-papiers

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    L’abonnement au journal est gratuit pour les prisonniers et les prisonnières. Les abonnements du dehors permettent ça. La censure qui frappe le numéro 52 ne concerne « que » ce numéro en détention. Contactez-nous !

    Notre bouquin pour troubler la fête du quarantième anniversaire de la prétendue abolition de la peine de mort est sorti ! Une manière parmi d’autres, que nous espérons nombreuses, de faire entendre quelques voix dissonantes dans l’écœurante auto-célébration du pouvoir.

    Ce livre réunit des paroles de prisonniers, de prisonnières et de proches publiées dans le journal depuis sa création en 2001 qui nous rappellent avec force qu’en réalité c’est seulement la guillotine qui a été supprimée en octobre 1981.

    Il est disponible dans toutes les bonnes librairies et sur la boutique de nos ami.e.s des éditions du bout de la ville.

    Il est gratuit pour toutes les personnes enfermées : écrivez-nous à contact@lenvolee.net pour que nous puissions le faire parvenir à vos proches emprisonné.e.s !

    Communiqué du collectif clandestin de la centrale d’Arles, octobre 2001

    « Comme toujours, la parole n’a pas été accordée aux principaux intéressés, à ceux et celles pour qui le quotidien est l’infamie carcérale, c’est à dire les détenus eux-mêmes !
    La parole ne nous est pas donnée. Jamais . C’est pourquoi nous avons décidé de la prendre, ici et maintenant.
    C’est particulièrement au nom des détenus « longues peines » que nous nous exprimons, nous, les laissés pour compte, ceux pour qui l’horizon n’est que désespoir et haine.
    Nous sommes là, face à vous, pour exiger que nous soient appliquées des mesures justes, équitables, qui nous permettent de croire que nous n’avons pas été condamnés à la mort lente, à des peines qui ne sont qu’un substitut à la peine de mort. »

  • Lettre du QI – justice d’abattage pour les sans papier – améliorer les conditions d’enfermement ?

    Lettre du QI – justice d’abattage pour les sans papier – améliorer les conditions d’enfermement ?

    Émission de L’Envolée du vendredi 22 octobre 2021
    • Lettre de Libre Flot, enfermé au quartier d’isolement de Bois d’Arcy d’où il capte la radio. Il revient sur des émissions précédentes et ses conditions d’enfermement. La lettre est en ligne sur notre site et une autre dans laquelle il revenait plus longuement sur l’isolement carcéral a été publié dans le dernier numéro du journal.
    • Qu’est ce qui se cache derrière l’amélioration des conditions d’enfermement ? L’Etat condamné à rénover la taule de Fresnes, mais derrière pour les prisonniers.ères, c’est toujours plus de sécuritaire.
    • Retour sur des audiences au juge des libertés et de la détention (JLD) du Mesnil Amelot, dans l’annexe du centre de rétention. Des personnes jugées et renvoyées entre quatre murs en moins de deux minutes, des procs et des commis d’office qui discutent, s’arrangent et blaguent entre les dossiers. Une justice d’abattage raciste. Il est important d’être présent dans ces salles pour ne pas laisser les juges et les baveux faire leur sale tambouille tranquillement.
    • Agenda, saluts, big up et dédicaces

    Notre bouquin pour troubler la fête du quarantième anniversaire de la prétendue abolition de la peine de mort est sorti ! Une manière parmi d’autres, que nous espérons nombreuses, de faire entendre quelques voix dissonantes dans l’écœurante auto-célébration du pouvoir.

    Ce livre réunit des paroles de prisonniers, de prisonnières et de proches publiées dans le journal depuis sa création en 2001 qui nous rappellent avec force qu’en réalité c’est seulement la guillotine qui a été supprimée en octobre 1981.

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    PS : Règlement intérieur type, article 19, annexe de l’article R57-6-18 du Code de Procédure Pénale « Les décisions administratives refusant à une personne prisonnière de commander une revue ou de la détenir peuvent faire l’objet d’un recours administratif. »


    Communiqué du collectif clandestin de la centrale d’Arles, octobre 2001

    « Comme toujours, la parole n’a pas été accordée aux principaux intéressés, à ceux et celles pour qui le quotidien est l’infamie carcérale, c’est à dire les détenus eux-mêmes !
    La parole ne nous est pas donnée. Jamais . C’est pourquoi nous avons décidé de la prendre, ici et maintenant.
    C’est particulièrement au nom des détenus « longues peines » que nous nous exprimons, nous, les laissés pour compte, ceux pour qui l’horizon n’est que désespoir et haine.
    Nous sommes là, face à vous, pour exiger que nous soient appliquées des mesures justes, équitables, qui nous permettent de croire que nous n’avons pas été condamnés à la mort lente, à des peines qui ne sont qu’un substitut à la peine de mort. »

  • Rencontre avec le blog La Sellette, chronique de Coco, manif des condés

    Rencontre avec le blog La Sellette, chronique de Coco, manif des condés

    Émission du vendredi 28-05-21

    · Annonce de la journée contre les violences pénitentiaires le 30 mai partout en France.

    · Mouvement à la prison de Borgo en Corse

    · Suite du mouvement à la MAF des Baumettes

    · Campagne de soutien aux inculpé·e·s du 8 décembre (soutienauxinculpeesdu8decembre.noblogs.org)

    · Rencontre avec Marie, qui vient de créer un nouveau blog, La Sellette :  » La Sellette s’intéresse à la justice pénale ordinaire, telle qu’elle se pratique quotidiennement dans les tribunaux. Ce qu’on appelle parfois la « petite justice », celle qui, loin des cours d’assises et des procès médiatiques, ne s’applique qu’à des affaires peu spectaculaires, pour lesquelles chaque jour des dizaines de personnes sont jugées et condamnées en moins de trente minutes, puis emprisonnées le soir même. Le cœur de ce blog est constitué de chroniques de comparutions immédiates. Une chambre leur est dédiée à Toulouse, où se tient la grande majorité des audiences décrites. »

    · Chronique de Coco, consacrée comme chaque mois à la santé en prison.

  • Flash info quotidien du 30 avril 2020 : la justice du confinement

    Flash info quotidien du 30 avril 2020 : la justice du confinement

    Actualité Covid-19 en prison :

    • Clin d’oeil : Olivier parle du procès de Valence pour le mouvement au QMC en 2016.
    • Discussion avec l’avocat Matthieu Quinquis : Comment les juges administratifs défendent l’administration pénitentiaire.
    • Billet de Pierrot : la justice du confinement renforce le pouvoir des juges.
    • Des nouvelles de Fresnes à la suite de l’incendie d’un local : les ELAC doivent partir.

    FACE AU COVID-19 EN PRISON : AMNISTIE GENERALE !

    Depuis 2001, L’Envolée, c’est une émission et un journal pour en finir avec toutes les prisons faits par d’anciens prisonniers et prisonnières et des proches pour relayer la parole des enfermé.e.s.
    L’abonnement au journal est gratuit pour les prisonniers et prisonnières qui en font la demande. L’épidémie de Coronavirus a de lourdes conséquences en prison. C’est pourquoi, face à la gravité de la situation, nous avons décidé de produire un bulletin d’information quotidien de vingt minutes, que vous pouvez écouter chaque jour de la semaine sur la FM, les plateformes de podcast et sur lenvolee.net, en plus de l’émission du vendredi qui est maintenue.

    Les émissions sont diffusées toute la semaine sur les ondes des radios : FPP (région parisienne, 106.3), Canut (Lyon 102.2), MNE (Mulhouse 107.5), Campus (Clermont-Ferrand 93.3), Clé des Ondes (Bordeaux 90.10), La Locale (Saint Girons 97.3), Prun’ (Nantes 92.0), Jet FM (Nantes 91.2), Galère (Marseille 88.4), Campus (Grenoble 90.8), Campus (Dijon 92.2), Panik (Bruxelles 105.4), St Affrique (Montauban 96.7), Dio (Saint Étienne 89.5), RKB (Guingamp 106.5), Vassivière (Royère 88.6), Canal Sud (Toulouse 92.2).
    Toutes les émissions sont aussi écoutables sur les plateformes de podcast.

    Il est plus que jamais nécessaire de ne pas laisser les prisonniers et les prisonnières seuls face à l’arbitraire de l’administration et de faire entendre leur voix. Nous relayons les actions collectives et individuelles dont vous nous informez ainsi que des témoignages directs sur la situation à l’intérieur. Tenez-nous au courant par tous les moyens à votre disposition. Nous diffuserons les messages vocaux et les textos de prisonniers et de prisonnières que vous nous enverrez. Nous lirons également les messages que les proches privés de parloir nous demanderont de passer.


    Notre numéro de téléphone : 07.52.40.22.48 (whatsapp, telegram, signal, appels et textos). Pour écrire : Radio FPP – L’Envolée, 1 rue de la solidarité, 75019 Paris, ou encore à lenvolee.net et sur instagram, twitter, facebook & snapchat.

  • Entretien avec Aurélie, sœur d’Angelo Garand abattu par le GIGN

    Entretien avec Aurélie, sœur d’Angelo Garand abattu par le GIGN

    « ON SE LAISSERA PAS FAIRE »

    INTERVIEW D’AURÉLIE, SŒUR D’ANGELO GARAND
    abattu par le GIGN en mars dernier pour n’être pas rentré en prison après une permission

    Bonjour Aurélie, merci beaucoup d’accepter de parler avec nous : pour cette journée « Adama, un an après », on a pensé que c’était quand même très important de ne pas parler seulement d’Adama, mais aussi de tous les autres qui se sont fait récemment tuer – assassiner, il faut bien dire le mot  par la police ; tu es la sœur d’Angelo Garand, qui a été exécuté – je pense qu’on peut le dire – chez ses parents par une équipe du GIGN, le 30 mars dernier.

    Aurélie : Bonjour. Oui, c’est important aussi pour nous de témoigner, parce que depuis le 30 mars, depuis que mon frère s’est fait tuer, tous les tués par la police ou par le GIGN, enfin par les forces de l’ordre, sont un peu devenus nos frères aussi ; on partage la peine, mais c’est vraiment une douleur… on perd notre frère, mais en plus c’est incompréhensible puisque c’est les personnes qui sont sensées nous protéger ! Ils ne sont pas sensés nous tuer, justement, et oui, ils ont exécuté mon frère de sept balles dans le corps ; on a appris qu’il avait sept balles dans le corps, donc y a pas d’autre mot : c’est une exécution, pour nous.

    C’est important que les gens comprennent bien ce qui s’est passé, parce que les médias n’en ont pas tant parlé que ça. Ton frère était en prison, il a eu une permission et il n’est pas revenu. Ce jour-là, il était chez tes parents, je crois ?

    A. : Mon frère était incarcéré à la prison de Poitiers-Vivonne ; au mois de septembre, ils lui ont donné une permission d’une journée et il n’est pas rentré. Mon frère vivait à droite, à gauche. Le 30 mars, il est venu manger une grillade, parce que mon petit frère était sorti de prison une semaine avant ; il était venu partager un repas familial, il ne faisait rien de mal, il n’a mis personne en danger ce jour-là. Vers 13 heures, le GIGN est intervenu : ils ont mis ma famille en joue, ils ont menotté mon père, mon frère, mon oncle ; il y avait aussi mon fils de quatre ans. Mon frère, il s’est juste caché ; il n’a pas couru, pas fui… on ne sait même pas s’il a pris conscience que c’était le GIGN. Il s’est juste caché dans une petite grange. Il n’y avait qu’une sortie, il ne pouvait pas s’échapper. Là, ils ont stoppé tout le monde, ils avaient tous leurs mitraillettes, enfin… Ils ont fouillé le terrain, et ils étaient prêts à partir, et mon frère a fait tomber un petit sac dans cette grange. Ça a été très vite, ils se sont précipités, ils étaient quatre, et aussitôt, ils ont tiré. Y a pas eu de bruit, y a pas eu de sommations, y a pas eu de « forte résistance » comme ont pu le dire les médias – enfin le procureur, du moins. Il a dit qu’il s’était rebellé, mais mon père était à un mètre de cette grange, menotté par terre – en train d’étouffer, parce que mon père a un appareil respiratoire –, et quand ils sont rentrés, ils ont tiré direct. Aucun bruit, pas un mot de la bouche de mon frère.

    Ton frère n’était pas armé ?

    A. : Non. Il devait avoir un couteau – c’était normal qu’il ait un couteau sur lui, puisqu’ils étaient en train de manger –  et c’est tout.

    Tu parles du GIGN : c’est important de dire que ton frère était juste pas rentré de permission – c’était pas du tout un prisonnier en cavale. En plus il était en prison pour vol, c’était pas du tout quelqu’un de dangereux, mais ils ont tout de même fait intervenir des équipes qui sont normalement là pour s’occuper de « forcenés », de « terroristes » …

    A. : C’est ce qui nous semble dégueulasse : ils lui donnent une permission, il rentre pas, ils font intervenir le GIGN, ils le tuent, et après ils criminalisent mon frère en disant qu’il était « dangereux », un « forcené »… mais c’est eux qui lui ont donné la permission ! Je ne crois pas que dans le monde carcéral, ils donnent des permissions aux hommes « dangereux ».

    On le sait bien : ils n’en donnent même pas aux « pas dangereux », alors ils n’en donnent pas aux « dangereux », c’est sûr.

    A. : Ils en donnent quand ils ont envie d’en donner. Maintenant, je me dis que cette permission, c’était n’importe quoi : une journée pour voir sa famille, alors que lui il était à Poitiers et que nous on est de Blois – quatre heures de train en tout. Pour voir sa famille, c’est beaucoup trop court, et mourir au bout du compte… Mon frère, jamais il n’aurait pensé mourir ; au pire, il s’était dit, le jour où il se serait fait prendre, c’était six mois de plus. Et c’est ce que tout le monde pense. Il n’était pas un cas isolé, à ne pas rentrer de permission. Et au bout du compte, ils l’ont abattu. En fait, il faisait rien de mal. Il était juste en famille, justement, sa famille dont il avait été privé si longtemps ; ils viennent, et ils l’abattent.

    Il purgeait une peine de combien, si c’est pas trop indiscret ?

    A. : Je ne sais pas trop, en fait ; là, il était au bout de sa peine, mais il avait été jugé au mois de janvier, encore pour des vols, et il venait de reprendre quatre ans – mais il le savait même pas lui-même.

    Il avait une trentaine d’années, c’est ça ?

    A : 37 ans. Il avait trois enfants, il avait eu un petit-fils au début de l’année et il venait d’avoir une petite fille, qu’il ne serrera jamais dans ses bras.

    Après le meurtre de ton frère, vous avez réagi très vite ; notamment, toi tu as fait une vidéo. Tu peux nous dire comment ça t’est venu ? On va diffuser le son de cette vidéo, parce qu’elle est bouleversante, et aussi parce que tu avais une dignité que j’ai trouvée incroyable. Tu as tout de suite été dans le combat.

    A. : Faut savoir que quand ça nous arrive, on ne peut pas pleurer notre frère, parce qu’on sait que si on se met à pleurer, on sera étouffés de toute façon. La vidéo, elle m’est venue à cause des propos du procureur. Il a dit à mes parents : « J’espère que ça fera pas comme en 2010, des débordements. » En 2010, s’il y a eu des « débordements », c’est parce qu’il y a un jeune Gitan de 22 ans qui a été abattu ici. J’ai dit : en fait, le procureur, il n’a pas à parler comme ça ! Tout ce qu’il attendait de nous, c’était les « débordements ». J’ai eu envie de lui renvoyer la balle, de lui dire : « Non, on se fera pas manipuler. »

    Comment tu préfères, toi, qu’on vous appelle : gitans, gens du voyage… ?

    A. : Bof, oui, gitans, gens du voyage, c’est comme ça qu’on nous a décrits dès le départ.

    En 2010, à St-Aignan–sur–Cher, un jeune de cette communauté a été tué, et il y a eu quelques « débordements », on va dire, ce jour-là – mais ce n’était pas énorme non plus, ce qui s’était passé ; en tout cas, la première réaction du procureur quand ils ont tué ton frère, c’est de vous demander de faire en sorte qu’il n’y ait pas de débordements, quoi.

    A. : Il nous a demandé de ne pas faire de débordements, mais on a bien vu que c’était tout ce qu’il attendait, en voyant les cars de CRS qui arrivaient. Quand ça s’est passé, on n’a pas eu le droit de rentrer chez nous, puisque le corps de mon frère est resté jusqu’à minuit ; on est revenus pour prendre des affaires, et là, en voyant juste les cars de CRS, on s’est dit : « Tout ce qu’ils attendent de nous, c’est ça. » Et en plus, on voyait les CRS nous regarder en rigolant… C’était de la provocation. Ils nous provoquaient. On s’est dit : « Si on fait ça… » – bien sûr qu’on a envie de faire ça, évidemment, on est en colère, très en colère, même, et encore à l’heure actuelle –  « Si on fait ça, on va passer encore à la mauvaise étiquette. » Parce que depuis des décennies, ils ne font que ça, nous coller cette étiquette de violence : on est méchants, on n’est pas des gens sociables… et à cause de ça, on meurt ; à cause de ça, on peut pas se défendre. C’est là que j’ai voulu renvoyer au procureur : « Non, justement, on ne se laissera pas faire, et de toute façon, les tueurs doivent être punis. »

    Donc tu fais cette vidéo, et assez vite, tu t’es rapprochée des associations de familles ?

    A. : Non, même pas. A ce moment-là, on a mis la vidéo en ligne comme ça. On ne savait même pas comment faire pour porter plainte, parce que la justice ne nous dit pas : « Si vous n’êtes pas d’accord, vous pouvez vous constituer partie civile… », enfin toute la procédure. En aucun cas elle ne nous donne les cartes en main. Quand il y a eu cette vidéo, Amal Bentounsi – du collectif Urgence, Notre Police Assassine –  m’a contactée, et m’a tout de suite donné des conseils : comment faire pour être partie civile… elle m’a donné l’idée de la cagnotte ; et de là, on a pu communiquer comme ça. Après j’ai eu d’autres associations comme La voix des Rroms, et j’ai rencontré d’autres familles de victimes aussi.

    Et vous avez organisé une manifestation, du coup, assez vite ; une marche, en fait, pour lui, un mois après…

    A. : Le 22 avril ; même pas un mois après. On voulait faire cette marche, justement, pour pas que ça coule, puisque sur Blois, voilà, ça a circulé ; nous, on a la mauvais image, alors justement, on doit communiquer là-dessus : que Gitan, délinquant, pas rentré de permission, en aucun cas il ne devait mourir. La peine de mort a été abolie, ça doit être pareil pour tout le monde, et on a voulu faire cette marche pour faire voir que nous aussi on va se lever, et on marchera le temps qu’il faudra marcher, et on ne se laissera pas faire – et en sa mémoire, surtout, parce que voilà, quoi, un mois après, tout le monde continue sa vie, et nous, on ne peut pas. Enfin, il y a une grande injustice.

    Comme tu dis, vous ne pourrez pas le pleurer tant qu’on ne vous dira pas qu’effectivement, il a été abattu.

    A. : Non. Et ça c’est très dur.

    On peut se mettre des œillères, se dire : « Non, la France n’est pas raciste » – mais bien sûr que oui, la France est raciste ! La France ne veut pas des Gitans, ne veut pas des Rroms, ne veut pas des Arabes, des Noirs !

    J’ai vu des photos de cette marche ; il y avait pas mal de monde, surtout pour une petite ville comme Blois, c’était surprenant ; et en plus, il y a des collectifs d’un peu partout qui sont venus aussi montrer leur solidarité.

    A. : On était environ 250, 300 personnes. Franchement, c’était la première fois que beaucoup d’entre nous, de notre communauté, assistaient à une marche ; ça fait du bien, quand même, de crier ce qu’on a envie de crier, et de leur dire qu’on ne se laissera pas faire.

    Et je crois que c’est ce jour-là que tu as tenu à t’arrêter devant le tribunal de Blois ? Je t’ai entendu dire un truc très fort, les mains dans le dos comme si tu étais menottée : que c’était un peu comme si c’était la deuxième fois qu’on le tuait, parce qu’avant déjà, la prison, la justice l’avaient beaucoup tué.

    A. : Oui, ça, c’était le 30 mai ; on a fait un rassemblement à Tours. Devant le tribunal de Tours, parce que mon frère, la première fois qu’il a été condamné, c’était à Tours ; et je me dis, depuis l’âge de ses 22 ans, la justice ne lui a laissé aucun répit, aucune chance. Maintenant, ils le criminalisent en disant qu’il était dangereux, mais il a essayé de s’en sortir, il a voulu s’en sortir, il a été travailler, mais à chaque fois on est toujours rattrapé par cette justice. Je me dis que toute la vie de mon frère, ça a été un condamné ; et notre vie à nous aussi, maintenant, parce qu’on est condamnés à la douleur. Et ça, je veux qu’ils le voient, et qu’ils sachent qu’ils ne se débarrasseront pas d’Angelo tant qu’il y aura sa famille. Ce qu’ils ont voulu faire de mon frère, c’est un condamné, en fait.

    Ils l’ont toujours condamné, d’une certaine manière.

    A. : Oui, la première fois qu’il est passé au tribunal, il a été décrit comme un pauvre voleur de poules. On peut se mettre des œillères, se dire : « Non, la France n’est pas raciste » – mais bien sûr que oui, la France est raciste ! La France ne veut pas des Gitans, ne veut pas des Rroms, ne veut pas des Arabes, des Noirs ! Ben, en fait, on a notre place et on nous doit le respect. On a l’impression de mendier quand on fait des marches ou des minutes de silence, mais moi je ne le prends pas comme ça : on ne mendie pas. C’est ce qu’on nous doit, et on compte bien l’avoir, et on va le prendre.

    En plus, il faut dire que du côté de Blois, il y a une grande communauté gitane.

    A. : Oui, on est pas mal, il y a de nombreuse familles. Il y avait aussi pas mal de gens de la population, qui voulaient voir ce qu’on voulait, ce qu’on voulait revendiquer. Du coup, on a eu des retombées assez positives, les gens nous sont tombés dans les bras en disant qu’on était des gens géniaux. On se dit : « Voilà, on a passé un cap, même si ce n’est qu’à Blois. » Au moins, on sensibilise les gens, ils voient que ce n’est pas vrai, la mauvaise étiquette.

    Comme je te disais tout à l’heure hors antenne, moi j’ai grandi là ; du coup, le racisme dont tu parles, je le connais bien. Je ne suis pas de votre communauté, mais je l’ai vu : il y a un vrai racisme vis-à-vis des tiens. Donc ça fait plaisir d’entendre que la population a compris deux, trois choses, quand même.

    A. : Oui, du moins ils commencent à comprendre. Parce que c’est vrai qu’ici, même en tant que femme, quoi, d’aller faire des courses, des fois c’est limite on a l’impression d’entrer au parloir ! On va faire les courses, on est toujours surveillée. C’est l’horreur.

    La prison nous a toujours privées d’eux, pour au bout du compte les abattre lâchement.

    Tu parlais d’Amal, c’est peut– être encore quelque chose qui vous rapproche : son petit frère aussi a passé son temps à faire des allers et retours en prison avant d’être exécuté pendant une pseudo-cavale.

    A. : Ouais. Le jour où Amal m’a appelée, tout de suite ça a été comme une sœur. On se comprend, puisque la prison nous a toujours privées. A l’heure actuelle, on ne peut même pas pleurer nos frères qui sont partis, qu’on ne tiendra jamais dans les bras ; la prison nous a toujours privées d’eux, pour au bout du compte les abattre lâchement.

    Tu parlais de La voix des Rroms; ils se sont solidarisés avec vous ? Il y a eu des actions communes ou des prises de parole communes ?

    A. : Oui, le 18 mai, à l’Insurrection gitane, j’ai été invitée pour une prise de parole avec Amal contre les violences policières ; et aussi pour avertir la population qu’avec les lois qu’ils ont sorties fin mars, au bout de deux sommations, ils ont le droit de vous abattre. Évidemment, quand il n’y a pas de témoins, ils ne se gêneront pas. Quand je vois pour mon frère, alors  qu’il y avait ma famille, mon petit garçon, ils ne se sont pas gênés. On a le devoir de communiquer là-dessus, de dire que ça pouvait arriver à tout le monde, et que même au bout de deux sommations, maintenant ils peuvent vous abattre. Pour moi la peine de mort a été rétablie en France, sans qu’on le sache.

    En plus, d’après ce que tu décris de ce qui s’est passé ce jour-là, il n’y a pas eu de sommations.

    A. : C’est ça, il n’y en a pas eu. Donc maintenant, s’ils ont le droit, en plus, ça va être un carnage ! Y a qu’à voir depuis le début de l’année : d’habitude c’était quinze par an, je pense que cette année on va dépasser les quinze.

    M. : Je crois qu’on en compte déjà sept ou huit.

    A. : Oui, je pense que mars-avril ça a été pire.

    Pour moi la peine de mort a été rétablie en France, sans qu’on le sache.

    Tu parlais d’une cagnotte ; on peut encore donner ?

    A. : Oui, sur Leetchi. C’est Justice pour Angelo. On a aussi ouvert une page Facebook : Justice pour Angelo, pour annoncer chaque prise de parole, ou même quand on participe aux marches.

    Tu me disais que vous alliez participer à la marche du 22 juillet ?

    A. : Oui, on va à Beaumont-sur-Oise samedi 22 pour Adama.

    D’ailleurs on invite tout le monde à y aller, même de loin ; parce que vous, vous êtes quand même pas juste à côté, Blois c’est pas la porte à côté. Mais il faut y aller, parce que comme tu dis : à chaque fois que quelqu’un tombe, ça nous rappelle tous ceux qui sont tombés avant. Ça finit par faire une fraternité entre tous les gens qui ont perdu des proches sous les balles de la police – et ça commence à faire du monde. Donc il faut que ce monde, il se transforme en force.

    A. : Comme ils disent dans une vidéo pour Adama : « A un, on fait rien, à mille on fait plus. » C’est ça le truc : il faut qu’on soit tous ensemble, que ce soit pour Adama, pour Angelo… enfin toute les victimes, on a tous le droit à la justice pour nos frères.

    En parlant de justice, vous vous êtes constitués partie civile contre ce procureur qui a surtout voulu éviter les débordement et qui a ensuite voulu faire passer Angelo pour quelqu’un de violent, de dangereux et tout ça… elle en est où, votre procédure ?

    A. : On s’est constitués partie civile, on a trouvé un avocat, mais le procureur a pris les devants : il a ouvert une enquête, il a saisi les juges, et là, on est en instruction. Mon père et moi, on a déjà été reçus, et ma famille doit être entendue au mois d’août.

    C’est instruit à Blois ? A Tours ?

    A. : Pour le moment c’est à Blois.

    Et tu penses que ça va travailler correctement ?

    A. : Pour le moment, la juge fait genre elle veut faire son travail… mais évidemment, on sait bien qu’il faut qu’on se mobilise quand même, parce que la justice, franchement… Personnellement, je n’ai aucun espoir dans la justice, quand on voit la vie de mon frère. Quand je vois la vie qu’il a menée, je me dis : « pourquoi eux, ils vont reconnaître un crime ? » Évidemment qu’il va falloir se battre.

    Mais si on ne lui met pas la pression, elle va le faire comme on lui demande de le faire.

    A. : Moi je pense. De toute façon, ça c’est sûr : la vérité, c’est ça, les tribunaux. Même au niveau de l’avocat, on n’a pas voulu prendre un avocat du secteur. Depuis toute petite, enfin depuis toujours, on a traîné dans les tribunaux, et on sait très bien comment ça s’y passe.

    En gros, souvent, les avocats sont très très copains avec les juges, pour parler clairement.

    A. : Moi je pense que les avocats et certains médias mangent ensemble le midi régulièrement.

    Une enquête est en cours, mais il n’y a pas de mise en examen des gendarmes ?

    A. : Non. Pas de mise en examen, ils exercent toujours.

    Ils n’ont pas été suspendus.

    A. : Non, ils ont été en garde à vue – enfin en garde à vue, j’aurais bien voulu faire leur garde à vue, mais bon –  du vendredi au samedi matin. Et après ils ont été relâchés, puisqu’ils disent que c’est de la légitime défense. Mon frère aurait opposé une « forte résistance », alors que mes parents n’ont pas entendu un bruit.

    On ne savait même pas, ce jour-là, que c’étaient des forces de l’ordre. Quand ils les ont vus arriver, ils ont pensé que c’étaient des… des assassins, en fait.

    J’ai aussi lu quelque part que vous n’aviez eu aucun soutien psychologique ?

    A. : Non, je me suis déplacée au tribunal justement parce que je me dis : « c’est à vous de nous donner quelque chose », et en fait non, y a rien ; ce qui me met hors de moi, c’est que ma famille est même pas considérée comme victime. Même au moment où ils ont tué mon frère, ils ont fait mettre toute ma famille alignée, avec une mitraillette, fallait qu’ils restent debout, toujours menottés, pendant que les femmes leur donnaient à boire. Ils ont pas à agir comme ça.

    C’est monstrueux.

    A. : C’est un manque de respect, c’est l’horreur. Mon père n’a pas connu la guerre, mais il a dit : « On se serait cru en Allemagne. » Vraiment, ça a rappelé des trucs qu’on n’a pas connus, des images… c’est vraiment l’horreur. Ils ont été au-dessous de tout. Ça a été des moqueries, aussi. Tout le long, ça a été, sur ma famille : « Fermez– là. » Du moment où ils ont passé le portail jusqu’au moment où ils sont repartis après avoir tué mon frère, il fallait que ma famille la ferme. On ne savait même pas, ce jour-là, que c’étaient des forces de l’ordre. Quand ils les ont vu arriver, ils ont pensé que c’étaient des… ben des assassins, en fait. Et c’est comme ça que ça a fini.

    En plus, comme tu dis, si toi, tu ne t’étais pas levée, si vous n’aviez pas décidé de vous lever, et s’il n’y avait pas eu du monde pour se mettre avec vous, c’était parti pour être enterré aussi sec. Ils l’ont tué, ils s’en vont, et il ne se passe rien, en fait.

    A. : Ben non, il ne se passe rien ; en plus, dans les journaux, ça a été tout de suite : « Un gitan en cavale ». C’est pour dire, dans la tête de la population : un Gitan ? – C’est pas grave ! Et il était en cavale en plus ? Il était délinquant ? Ils ont criminalisé mon frère, mais bien à leur façon.

    C’est un truc qu’on retrouve hélas dans toutes les histoires. Il font toujours passer la victime pour le coupable et tentent toujours de salir sa mémoire, de salir ses proches… Ils racontent toujours qu’il était drogué, ou violent ; ils trouvent toujours de bonnes raisons pour justifier qu’ils ont appliqué la peine de mort.

    A. : Oui, j’ai rencontré pas mal de familles de victimes depuis, et on vit la même chose. Les façons d’agir sont toujours les mêmes. Mon frère a pris sept balles dans le corps ; quand il est tombé, ils l’ont menotté. Vraiment aucun respect. Après toute la prison qu’il a fait, il est pas rentré de permission, ils viennent, ils le tuent et ils le menottent. Condamné jusqu’au bout, en fait. J’ai rencontré d’autres familles de victimes à qui c’est arrivé ; après la mort d’Adama aussi, il était aussi toujours menotté.

    L’autre truc, c’est le racisme : ça touche toujours les mêmes. Vous, on pourrait croire, comme ça, vu de loin, que vous êtes mieux « intégrés », plus acceptés – parce que plus blancs, peut– être –  ; mais pas du tout. Vous êtes exactement dans le même cas.

    A. : J’ai été choquée, au départ, enfin ça m’a interpellée, la réaction des gens qui disaient : « Vous aussi, les Gitans ? » Mais moi, il y a trente ans, le cousin de mon père se faisait tuer d’une balle dans la tête à Blois. On l’a toujours vécu sans trop en parler. Je me dis, maintenant, faut stopper, faut que ça s’arrête. Dans toutes les communautés discriminées – parce qu’on est tous pareils, en fait.

    C’est très important de le dire : il ne faut pas croire qu’il y a des gens qui souffrent moins que d’autres du racisme d’État – parce que là, c’est vraiment ça : c’est la police qui exécute des gens. Il s’applique à toutes les communautés.

    A. : Faut dénoncer, faut se mobiliser ensemble. Même s’il arrive des fois qu’on ne soit pas beaucoup, même s’il y a des pertes de moral, il faut le faire. Pour éviter que d’autres familles se retrouvent à notre place. Maintenant, on a les réseaux sociaux : heureusement ! Mais combien de familles doivent vivre comme ça, étouffées ? Combien de familles n’ont jamais eu l’occasion de prendre la parole ? La justice nous dit pas de se constituer partie civile… Je pense qu’il y a pas mal de familles qui se sont pas levées à cause de ça.

    On parlait de prison – en ce moment on parle des violences policières, mais on sait qu’en prison, hélas, c’est pareil : il y a un suicide tous les trois jours en prison, mais tous ceux qui connaissent un peu la prison savent très bien que certains de ces suicides ne sont pas clairs du tout. Il y a aussi des morts en prison qui sont sans doute des assassinats.

    A.: Je pense, oui, avec aussi la pression psychologique… Rien que des fois, en allant au parloir, on voit la mentalité des surveillants.

    Faut dénoncer, faut se mobiliser ensemble. Même s’il arrive des fois qu’on ne soit pas beaucoup, même s’il y a des pertes de moral, il faut le faire.

    Rappelons que pour vous soutenir, il y a cette page Facebook : Justice pour Angelo.

    A. : La page Justice pour Angelo sur FB, la cagnotte Leetchi pour les frais de justice et les événements, et on a aussi une pétition à signer et à partager sur la page.

    Vous avez prévu d’autres marches, d’autres actions ?

    A. : Non, pour le moment on a rien prévu. On attend d’être entendus. Surtout ma famille, qui est citée comme témoins ; c’est ce qui est le plus important.

    Il me reste à te souhaiter beaucoup de force ; on est avec vous. Hésite pas à nous contacter, que ce soit l’Envolée ou la radio, pour qu’on vous file des coups de main ; dès que vous voulez dire quelque chose, hésitez pas, on est là pour ça. Salue ta famille pour nous. Force à vous.

    A. : Merci de faire ce que vous faites.

    On fait pas grand-chose, tu sais ; on est juste un relais.

    A. : C’est quand même bien ; parce que c’est rare.

    Interview réalisée dans le cadre de la journée « Adama, un an après » sur les  ondes de Canal Sud Radio et de La Locale