Étiquette : isolement

  • Le n°56 de L’Envolée interdit en prison – Contre la construction de nouvelles taules – Un an depuis la mort suspecte de Théo Sahna

    Le n°56 de L’Envolée interdit en prison – Contre la construction de nouvelles taules – Un an depuis la mort suspecte de Théo Sahna

    Émission de L’Envolée du vendredi 27 janvier 2023
    • Lettre anonyme qui témoigne de la saisie du numéro 56 : « C’est abusé, dès que L’Envolée retransmet un procès de matons, ils censurent le numéro… Vous les touchez là où ça leur fait mal ! »
    • Lettre d’En deçà du réel : « Vous voulez interdire, censurer [L’Envolée] car vous connaissez la puissance des mots qui reflètent la vérité. »
    • Lecture amusée de la note du ministère qui nous censure. On rappelle que le meilleur des soutiens à apporter de dehors est de s’abonner ! Les abonnements dehors permettent l’envoi gratuit du journal à toutes les personnes enfermées.
    • On lit l’hommage aux combats du regretté Romain Leroy. Force à ses proches !
    • Christine raconte les initiatives dans toute la France pour empêcher les constructions de nouvelles prisons. Le dernier « plan prison » prévoit la construction de 15 000 nouvelles places. Depuis plusieurs années, des collectifs s’organisent pour les contrer, comme les rencontres pour partager la niak et les idées : rendez-vous à Toulouse ce weekend, et ce printemps à Entraigues mi-avril ! On peut aussi retrouver le collectif Crève la taule 84 dans leurs émissions de V’la la gamelle sur radio Aïoli, sans oublier l’émission anticarcérale des potes de Marseille, sur radio Galère, La Courte Échelle
    • Un an depuis la mort de Théo Sahna à Fresnes : un message de sa veuve et un retour sur sa mort suspecte qui reste sans réponse, comme tant d’autres. La prison tue, encore et toujours. De plus en plus de familles se battent contre la violence d’état et imposent le sujet.
    • C’est le retour de la chronique santé et prison de Coco autour de la Journée de solidarité avec les personnes trans, non-binaires et intersexes incarcéré.e.s, le 22 janvier.
    • Lecture du dernier communiqué des amis de JC Merlet, enfermé à Roanne, qui continue de payer le fait d’avoir dénoncé la mise à mort de Sambaly Diabaté par les surveillants de Saint Martin de Ré.

    Musique : Smells Like Teen Spirit – Blue Mode, Kwaku the Traveller – Black Sherif, Méthode Rouge – Vïrus x Al’Tarba, Soledad – El Combo de los Galleros, Prison Song – Carlton Williams, Arrête Mal Parlé – Fair Nick Star.

    L’Envolée est une émission radio pour en finir avec toutes les prisons. Elle donne la parole aux prisonniers, prisonnières et leurs proches & entretient un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur des prisons. C’est aussi un journal d’opinion de prisonniers, de prisonnières et de proches.

    On manque de forces pour faire tourner l'émission radio comme on le souhaiterait en ce moment : que vous soyez prisonnier·e·s, proches, ou révolté·e·s contre l'enfermement et l'AP n'hésitez pas à nous contacter et à passer le mot !

    Direct chaque vendredi de 19h à 20h30 sur FPP 106.3 en région parisienne et MNE 107.5 à Mulhouse, RKB 106.5 en centre-Bretagne lundi à 22h, Radio Galère 88.4 à Marseille le jeudi soir à 20h30, PFM à Arras et alentours 99.9 mardi à 21h30, Canal Sud 92.2 jeudi à 17h30 à Toulouse, L’Eko des Garrigues 88.5 à 12h le dimanche à Montpellier, Radio U 101.1 le dimanche à 16h30 à Brest, Radio d’Ici 106.6 à Annonay mardi à 21h30 et 105.7 FM & 97.0, à Saint-Julien-Molin-Molette dimanche à 20h et sur les webradios Pikez (dimanche à 11h) et Station Station (lundi à 13h). Podcasts disponibles sur toutes les plateformes !

    Pour nous joindre : 07.53.10.31.95 (appels et textos).
    Pour écrire : Radio FPP – L’Envolée, 1 rue de la solidarité, 75019 Paris,
    contact@lenvolee.net 
    et sur instagram, twitter, facebook.

    L’abonnement au journal est gratuit pour les prisonniers et les prisonnières. Le n° 56 vient de sortir, abonnez vous et vos proches enfermés !

  • Alassane Sangare mort à Fleury – Des autoreduc’ face à la précarité – Des prisonniers contre le régime d’isolement 41 bis en Italie

    Alassane Sangare mort à Fleury – Des autoreduc’ face à la précarité – Des prisonniers contre le régime d’isolement 41 bis en Italie

    Émission de l’Envolée du vendredi 23 décembre 2022
    • Retour sur la mort d’Alassane Sangare à Fleury le 24 novembre 2022, 5 jours après son incarcération. Ses proches ne l’apprendront que le lendemain. La famille demande aux personnes qui souhaitent la soutenir d’écrire tous les jours à l’unité médico-judiciaire de Corbeil Essone pour demander à ce que le rapport d’autopsie leur soit enfin transmis. Retrouver la lettre type et les infos sur leur page insta. Encore une fois, la prison tue, crève la taule. Force et soutien aux proches d’Alassane.

    • Discussion autour du mouvement des autoreduc pendant le premier confinement : lutte contre la précarité et répression. Deux ans plus tard, des procès pour certain.es participant.es et des appels à de nouvelles mobilisations.

    • Dénonciation du régime d’isolement particulièrement affreux du 41 bis en Italie. Initialement créé contre les membres de la mafia dans les années 1990, ce régime extrêmement dur est aujourd’hui élargi et concerne 750 prisonniers. Retour sur la situation d’Alfredo Cospito, actuellement en grève de la faim depuis plus d’un mois contre son placement en 41 bis. Juan et Anna, deux prisonnier·e·s en Italie, et Ivan, prisonnier à Villepinte (en France), sont également en grève de la faim en soutien à Alfredo. Alfredo Cospito a été condamné à la peine de perpétuité incompressible pour « massacre politique ». Plus d’infos disponibles ici.

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    L’abonnement au journal est gratuit pour les prisonniers et les prisonnières. Le numéro 55 est dispo et déjà censuré par l’Administration pénitentiaire ! Raison de plus pour le faire tourner !

    Notre bouquin pour troubler la fête du quarantième anniversaire de la prétendue abolition de la peine de mort est sorti ! Une manière parmi d’autres, que nous espérons nombreuses, de faire entendre quelques voix dissonantes dans l’écœurante auto-célébration du pouvoir.

    Ce livre réunit des paroles de prisonniers, de prisonnières et de proches publiées dans le journal depuis sa création en 2001 qui nous rappellent avec force qu’en réalité c’est seulement la guillotine qui a été supprimée en octobre 1981.

    Il est disponible dans toutes les bonnes librairies et sur la boutique de nos ami·e·s des éditions du bout de la ville.

    Il est gratuit pour toutes les personnes enfermées : écrivez-nous à contact@lenvolee.net pour que nous puissions le faire parvenir à vos proches emprisonné·e·s !

  • Tribune pour dénoncer l’impact des mesures d’assignation à résidence en France

    Tribune pour dénoncer l’impact des mesures d’assignation à résidence en France

    Nous relayons ce communiqué diffusé à l’occasion du 10 décembre, la « journée internationale des droits de l’homme ». Le livre de Kamel Daoudi, « je suis libre, dans le périmètre que l’on m’assigne », est dispo par ici. (gratuit pour les enfermé·e·s, contactez-nous !)


    En cette journée internationale des droits humains, cette tribune souhaite dénoncer l’impact sur sur tout un chacun, des mesures d’assignation à résidence prises par les autorités françaises au travers de la situation individuelle paroxystique de Kamel Daoudi, assigné à résidence et obligé de pointer plusieurs fois par jour au commissariat depuis maintenant plus de 14 ans.
    Ces privations lui interdisent la possibilité de travailler et de vivre normalement avec sa famille, le plongeant ainsi dans une situation de précarité économique et sociale évidente. Nous dénonçons ce qui apparaît très clairement comme un régime de privation de liberté constitutif d’une atteinte à l’état de droit.


    Cet état de privation de liberté a été soumis à la discrétion de l’autorité publique, sans limite dans le temps, ni intervention du juge de la liberté et de la détention (JLD). En somme, Kamel Daoudi pourrait rester sous ce régime de privation de liberté jusqu’à la fin de sa vie.
    Condamné pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste en France pour un projet qui lui a été imputé qu’il a toujours contesté, il a purgé sa peine de prison, et reste pourtant sous le coup d’une interdiction définitive de territoire français inapplicable. Une privation de liberté contrôlée par l’administration sans limite de temps.
    Ce genre de cas permet à l’administration de priver ou restreindre la liberté de personnes de manière illimitée dans le temps.


    Kamel Daoudi déchu de sa nationalité française en 2002 est considéré par la France comme un étranger mais ne peut pas expulsé du territoire, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) ayant donné suite à la requête de M. Daoudi en prononçant l’impossibilité pour la France de l’éloigner vers l’Algérie (son pays de naissance qu’il a quitté à l’âge de 5 ans).


    En effet, M. Daoudi y risque des traitements dégradants et inhumains au sens de la convention européenne des droits humains. Par ailleurs, toute sa famille réside en France et il n’a plus aucune attache avec son pays de naissance depuis plus de 42 ans. Kamel Daoudi est donc assigné à résidence administrative depuis le 25 avril 2008, subissant l’application d’un régime d’exception permettant à l’administration, sans aucune intervention du JLD, « jusqu’à ce qu’existe une perspective raisonnable d’exécution de [son] éloignement. » (L.561-1 du CESEDA).
    Cette « perspective raisonnable d’exécution de son éloignement » n’étant pas possible au vu de la décision de la CEDH, cela confère à ce régime d’assignation à résidence un caractère perpétuel.
    Kamel Daoudi pourrait donc rester jusqu’à la fin de sa vie dans ce régime de privation de liberté. Une décision prise sur des motifs flous à interprétation large.

    Cette décision d’assignation à résidence repose sur le CESEDA (Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile) et s’appuie sur la notion de « trouble à l’ordre public », une notion à très large spectre d’interprétation et potentiellement arbitraire.


    Amnesty international dénonce depuis des années l’assignation à résidence de Kamel Daoudi, alors que la justice n’a plus rien à lui reprocher. Cette situation porte atteinte à ses droits fondamentaux, y compris son droit à travailler ou son droit à la vie privée et familiale.Cette situation est en outre maintenue par le ministère de l’intérieur maintenant Kamel au milieu d’enjeux politiques dépassant largement sa personne.
    Plus largement, cette notion de « trouble à l’ordre public » peut tout à fait, selon les interprétations s’appliquer à des militant.e.s œuvrant contre les intérêts du gouvernement en place. La frontière est fine pour que les motifs fondant l’application de ces régimes de privation de libertés soient applicables à d’autres situations pouvant être jugées par l’autorité publique comme risquant de troubler l’ordre public.


    L’assignation à résidence n’est pas le seul dispositif de contrôle et de surveillance, elle fait partie d’un arsenal juridique répressif qui va de la perquisition administrative, jusqu’à l’interdiction de paraître dans certains lieux.
    Des exemples récents nous l’ont encore montré, des décisions de ce type ont été prises contre des militants écologistes lors de la COP 21, des syndicalistes ou encore des supporters de football.
    Une décision qui s’inscrit dans un mouvement d’intégration des régimes d’exception dans le droit commun.


    Plusieurs régimes d’exception ont été mis en place ces dernières années et ceux-ci ont donné lieu à une transposition de cette législation d’urgence dans le droit commun. L’état d’urgence en réaction aux attentats de 2015 et prorogé plusieurs fois jusqu’en 2017 a permis l’entrée en vigueur de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme reprenant de façon substantielle, ce régime d’exception.


    La situation exceptionnelle et excessive à laquelle sont confrontés Kamel Daoudi et sa famille est devenue la règle pour un ensemble de décisions de privations ou de restrictions de libertés potentiellement applicables à toute personne vivant sur le territoire français, étrangère ou française.


    * * *


    Nous dénonçons donc à travers cette situation l’ensemble des atteintes à l’état de droit produit par la délégation de l’exécution des peines à l’autorité publique. Par son lien étroit avec les enjeux politiques, l’autorité publique ne peut être en aucun cas garante d’une justice équitable.
    Nous considérons que l’assignation à résidence est une privation de liberté et qu’une personne sous le joug d’une telle décision doit être en mesure de voir les conditions de cette privation, contrôlées par le Juge des Libertés et des Détentions.
    Nous dénonçons l’ensemble des dérives juridiques de la lutte contre le terrorisme, imprégnant les personnes d’une tache indélébile de nature à justifier toute forme d’atteinte à leurs libertés fondamentales.


    Nous dénonçons l’entrée dans le droit commun et la massification de ces décisions privatives de libertés souvent basées sur le principe flou de « trouble à l’ordre public » de plus en plus appliquées à n’importe quelle personne française ou étrangère exerçant des droits fondamentaux comme celui de manifester et bien d’autres.


    Collectif de Défense des Libertés Publiques
    France, le 10 décembre 2022

  • Cantine de soutien au Réseau d’Entraide Vérité et Justice autour de « Depuis qu’ils nous ont fait ça », le livre d’Aurélie Garand !

    Cantine de soutien au Réseau d’Entraide Vérité et Justice autour de « Depuis qu’ils nous ont fait ça », le livre d’Aurélie Garand !

    Le livre d’Aurélie Garand est bientôt partout en librairies ! On en profite pour vous inviter aux prochaines présentations de son livre, mais aussi à la Cantine de soutien au Réseau d’Entraide Vérité et Justice à Paris ! Important : le livre est gratuit pour les enfermé⸱e⸱s, contactez-nous !

    Pour + d’infos, cliquez sur l’image !

    « Quand quelqu’un essaye de s’évader de prison, les matons ont le droit de lui tirer dessus. Pour Angelo, il faut croire qu’ils ont laissé le GIGN prendre le relais. Après l’avoir laissé sortir, ils ont raconté partout que c’était un évadé, mais moi j’appelle ça un déserteur. Il ne voulait pas crever dans leur prison de morts.Toute sa vie d’adulte, il aura été un condamné. Depuis qu’ils nous ont fait ça, ils n’ont plus le contrôle sur lui. Il n’est plus un numéro d’écrou. Bientôt, il ne sera même plus un numéro de dossier en cours. Il restera pour toujours Angelo Garand, mon frère. »

    Le 30 mars 2017, Angelo Garand, qui appartient à la communauté des Voyageurs, est abattu de cinq balles par une équipe du GIGN sur le terrain de ses parents, dans le Loir-et-Cher. L’équipe intervenait pour le ramener à la prison de Poitiers-Vivonne où il purgeait une peine pour vol : quelques semaines plus tôt, il n’était pas rentré de la permission de sortie d’une journée qui lui avait été accordée. Il n’était pas armé.

    La famille Garand sait que les membres du GIGN mentent quand ils invoquent la légitime défense. Aurélie prend publiquement la parole, quelques heures plus tard, pour le hurler à la face du monde. Commence alors pour elle et les siens un combat âpre et désespéré pour que la vérité soit reconnue par la justice. Cinq ans plus tard, tous les recours sont épuisés : les tueurs ne seront jamais inquiétés, leur version des faits pour toujours reconnue.

    Aurélie Garand, quant à elle, habite toujours sur le terrain de ses parents, à une dizaine de mètres à peine de la remise où Angelo « a été exécuté ». Elle est convaincue que la mort de son frère n’est que l’aboutissement d’une trajectoire tracée depuis bien longtemps : tombé dès l’enfance dans les mains de la justice, pris dans « l’engrenage carcéral », il a multiplié depuis les petites peines de prison et n’était plus, aux yeux de l’État, qu’un délinquant, un problème à régler. Mais son destin tragique remonte peut-être à plus loin encore, dans la construction ancestrale de la figure du Voyageur, coupable et perdu d’avance.

    Elle signe un texte sec, fiévreux, d’une pudeur bouleversante, qui mêle récit de lutte et souvenirs de sa « vie d’avant », qui rend un hommage exigeant à son frère et à sa communauté,qui affirme un point de vue acéré sur la justice, la prison, les violences d’État, et qui prône avec force l’indispensable solidarité entre « tous ceux qui sont pris dans la cible ».

    Aurélie Garand,  « Depuis qu’ils nous ont fait ça… », Les éditions du bout de la ville, 112 pages, 10 euros.

    RENDEZ-VOUS :

  • Expérimentations sécuritaires et violences pénitentiaires : lettres sur le QI et le mitard

    Expérimentations sécuritaires et violences pénitentiaires : lettres sur le QI et le mitard

    Le QI (quartier d’isolement) et le mitard sont les parties de la prison les plus propices aux violences pénitentiaires. Francis Dorffer explique comment les QI deviennent de plus en plus invivables, au rythme de la diffusion progressive des nouvelles logiques sécuritaires. Beaucoup de morts en prison ont lieu à l’isolement ou au mitard, comme le dit Kémi dans une lettre écrite le 29 mai 2022 à l’occasion de la journée nationale contre les violences pénitentiaires. Anonyme, une quatrième lettre revient sur le caractère systémique des violences contre les prisonnier·e·s, spécialement au QI.


    « À chaque transfert, je recommence le circuit de la mort à zéro »

    Lettre de Francis Dorffer

    Nous avons publié au début de l’année une lettre ouverte de Francis écrite en décembre 2021 depuis Saint-Maur. Transféré à Arles, il continue à y subir la gestion toujours plus sécuritaire des QI. Cette première lettre a été lue à l’antenne le 18 mars 2022.

    Maison centrale d’Arles, quartier d’isolement,

    Le 15 février 2022

    Aujourd’hui en prison, on n’y fait plus attention, mais la sécurité prend une place de plus en plus énorme et déshumanise tout. Depuis un certain temps, au nom de la sécurité, on a laissé tomber toute forme de sympathie ou même d’humanité. Depuis bientôt trois ans, je vis à l’isolement enfermé 24 heures par jour. C’est par une trappe dans la porte que je dois passer mes mains pour être menotté dans le dos, par des casqués équipés de boucliers, pour sortir de cellule. Comment me sentir bien ? Comment résister et ne pas tomber dans la haine, dans la violence ? Je résiste sans dire un mot. Malgré les années qui sont passées, à chaque transfert, je recommence le circuit de la mort à zéro.

    Exemple : ici, on m’a mis dans une cellule dite « de force », où la fenêtre ne s’ouvre presque pas, les toilettes et le lavabo sont dans du béton, il n’y a aucun meuble à part une table en ferraille attachée au sol. Et le pire, je suis menotté à chaque sortie de cellule par des surveillants qui me tiennent par chaque bras. Imaginez un rendez-vous ! La personne vous voit arriver avec cinq surveillants équipés comme des robots ! Super, les entretiens menottés dans le dos. Au dentiste les menottes me rongent la peau car je suis assis dessus, et je me casse les poignets. Je pense que les directions qui prennent ce genre de mesures contre moi ne se rendent même plus compte qu’ils participent à un acharnement et cela commence à me ronger.

    Je vis en détention depuis vingt-deux ans. J’ai passé plus de temps en prison qu’à l’extérieur, j’ai été condamné à une peine qui est la plus longue infligée en France. En tout, quatre-vingt-six années de détention ont été prononcées contre moi et j’ai encore un jugement en attente. Pour ceux qui ont du mal à y croire, qu’ils contactent mes avocats ou qu’ils regardent sur le net.

    Quand j’entends que la France est un pays fondateur des droits de l’homme, ça me dégoûte. Et mes droits, ils sont où ? Ah, je suis un taulard, donc je peux m’asseoir dessus ? Les gens pensent : « il est en prison, il l’a bien mérité », mais non ! J’ai pas mérité d’être condamné à autant. J’ai pas versé une seule goutte de sang. Dans mes prises d’otages, je n’ai pas frappé une seule fois un otage ! Pourtant on m’a condamné comme si j’avais tué cent fois, et c’est ma quinzième année de détention au QI, et actuellement j’en suis à la troisième d’un trait. Menotté et baluchonné chaque année, car à chaque fois on me dit : « reste tranquille et on va enlever les menottes », arrivé quelques mois on me met les menottes devant, puis paf on me transfère ailleurs et arrivé dans une nouvelle prison on me dit :

    "On te connaît pas, donc on repart sur le menottage dans le dos, si tu reste tranquille on verra pour te les mettre devant !"

    Que la France arrête de faire semblant d’être un pays humain et surtout qui respecte les droits de l’homme. Ça fait 22 ans que je suis en prison et chaque jour on m’attache comme un chien ! C’est ça, se réinsérer, les gens ! En les attachant dans le dos ! En les éloignant de leurs familles, en les laissant des années au QI, en les laissant sans rien. Bref, ce que je sais, c’est que c’est pas comme ça qu’ils vont me casser !

    Force et courage à tous, soyez forts, et si besoin écrivez-moi, je répondrai.

    Francis Dorffer


    En direct des abattoirs français

    Lettre de Francis Dorffer

    Nous avons publié au début de l’année une lettre ouverte de Francis écrite en décembre 2021 depuis Saint-Maur. Transféré à Arles, il continue à y subir la gestion toujours plus sécuritaire des QI. Cette seconde lettre a été lue à l’antenne le 18 mars 2022.

    Maison centrale d’Arles, quartier d’isolement,

    Le 20 février 2022

    Aujourd’hui, la prison a pris un tournant ultra-sécuritaire. C’est de plus en plus inquiétant : en 2022 le budget pénitentiaire a voté 145 millions d’euros rien que pour le volet sécuritaire ! Quand le budget pour les alternatives à la prison s’élèvent à 300000 euros ! Ou la prévention de la récidive : 90 millions ! C’est hallucinant. À ces deux catégories, on n’arrive même pas au budget alloué pour la sécurité. Alors que les deux sont essentiels. Sur le terrain, la hausse de l’hyper-sécuritaire se fait ressentir chaque jour un peu plus.

    Quand on se penche un peu sur les quartiers d’isolement… Pour être concret : il y a quinze ans, j’étais en QI dans des maisons d’arrêt. Il n’y avait pas de système de trappes aux portes. Aujourd’hui, 90% des QI sont munis au moins partiellement de ces trappes ! Et ce qu’il se passe, c’est que dans beaucoup de QI, vu qu’il y a ces trappes aux portes, les agents n’ouvrent quasiment plus les portes. La facilité de venir seul et de distribuer le courrier, les cantines ! Voire dans certains cas, les repas. Et l’humain disparaît petit à petit. Même des audiences sont faites par les trappes ! Et je ne suis pas une exception. Des détenus traités comme moi, il y en a de plus en plus… Il faut que ça cesse ! On a pas le droit de laisser des êtres humains comme ça ! Le contact avec les surveillants ne fait plus que le bruit de la ferraille des menottes et le claquement des boucliers, chaque jour depuis trois ans. Et je vous le dit, il y a des centaines de détenus qui vivent ça. Mais les pauvres ont tellement laissé le temps passer que pour eux, c’est normal ! C’est devenu banal de laisser les gens mourir à petit feu comme ça.

    Et quand il y a des incidents, on relance les vieux débats, les manques de moyens, etc. Non ! Stop ! Aujourd’hui le directeur d’une prison peut placer un prisonnier au QI, le faire menotter, lui imposer des agents équipés casqués avec boucliers, lui imposer des heures de sortie (1 heure du matin !), le mettre en position animale ! Et après ils vont dire : « regardez, le mec est violent ». On fabrique des bombes humaines et quand elles explosent on se demande comment c’est arrivé. Non, vraiment, stop ! Il est temps de traiter les détenus comme des humains et de leur laisser l’espoir, la vie est déjà assez compliqué pour nous. Il faut que ça cesse ! Venez voir !

    Merci à tous,

    Francis Dorffer


    Le mitard et l’isolement

    Lettre de Kémi

    Kémi écrit dans cette lettre, lue à l’émission du 20 mai 2022, qu’il est sorti d’isolement peu de temps avant, en janvier 2022. Cependant, l’AP a depuis décidé de l’y remettre au courant de l’été 2022...

    Maison centrale de Saint-Maur,

    Mai 2022

    Bonjour à tous,

    Je vous écris de la centrale de Saint-Maur, je m’appelle Mickaël, j’ai 33 ans et ça fait dix ans que je suis en cellule, et il me reste encore dix ans sur le papier, tout ça pour vous dire que je connais bien le mitard et l’isolement. D’ailleurs, récemment je suis sorti de l’isolement après un bref séjour de deux ans, le mitard je connais que trop bien aussi malheureusement, j’ai même connu les fameux 45 jours fermes de cachot ! Un mois et demi enfermé dans 3 m² avec rien, même la radio ils font galérer pour nous la donner !

    La France devrait fermer ces lieux sombres, sérieux

    L’isolement en France c’est quoi ? C’est ni plus ni moi que les QHS (quartiers de haute sécurité) des temps modernes ! On est 23H/24 enfermés en cellule, impossible de voir à quoi ressemble ton voisin de cellule, et si tu parles à la fenêtre faut faire très attention à tes propos et avec qui tu les tiens pour éviter que l’AP te colle une étiquette chelou sur ton dos ! Si tu t’énerves faut être préparé car ils entrent dans ta cellule avec le bouclier et les tenues pare-coups, et te sautent dessus, donc quitte à faire du mitard, autant y aller pour une raison valable…

    Ça peut paraître brutal, mais en vrai vous êtes loin de la vérité, c’est encore plus brutal. Je m’exprime pas très bien, mais c’est des abattoirs à détenus. Regardons la vérité des choses, la plupart du temps, quand un détenu perd la vie, c’est soit au mitard, soit à l’isolement, ou alors par un incendie dans la cellule…

    L’isolement et le mitard en France, ce sont des lieux où l’on se sert des détenus comme des cobayes, ils essayent de vous shooter avec des médocs, ou alors ils te piquent, c’est la camisole de force par injection, c’est des oufs ! La France devrait fermer ces lieux sombres, sérieux, vous ne pouvez pas imaginer ce qui s’y passe !

    Oui c’est vrai, à l’isolement, on a le droit à la télé et aux cantines mais si tu bosses pas et que t’as pas de soutiens à l’extérieur tu fais comment ? Rares sont les quartiers d’isolement où tu peux bosser, la télé n’est pas gratuite, c’est 20€ par mois, et même si t’as la télé tu peux passer plusieurs années à l’isolement coupé de tout, si tu commences à parler à ta télé et que tu attends une réponse, ben, pose-toi les bonnes questions !

    J’ai vécu une nuit au mitard en 2014 où je me suis battu pour ma vie, merci à mes voisins qui ont fait le bordel

    J’ai personnellement côtoyé l’isolement, j’ai passé plusieurs années dans ces mouroirs. Le mitard c’est pareil, on doit rester sur nos gardes 24H/24. Pour tout vous dire, j’ai vécu une nuit au mitard en 2014 où je me suis battu pour ma vie, et merci à mes voisins qui ont fait le bordel quand ils ont entendu la bagarre dans ma cellule, à cette époque j’étais le détenu à briser voir plus après une prise d’otage dont j’ai été l’auteur, quand on joue avec l’AP, on joue sa vie !

    Bref, j’espère que ces quelques mots permettront de voir un peu ce qu’est l’isolement et le mitard… Force, courage et honneur pour tout·e·s les détenu·e·s de France et leurs familles !

    Mickaël, AKA Kémi


    « S’adapter, ne pas s’habituer »

    Lettre d’un lecteur anonyme de L’Envolée

    Cette lettre a été lue à l’émission du 17 juin 2022.

    Dans une prison de France, quartier d’isolement,

    Juin 2022

    Salam, peace à toute la populace,

    Je suis un lecteur assidu de L’Envolée, un révolté de nature, qui au fur et à mesure vire entre haine et dégoût. Innocent ? Nan, sûrement pas, et alors ? Non coupable ? Ça dépend des points de vue. Plus de sept ans de détention, six ans d’isolement ininterrompu, réclusion criminelle à perpétuité, la trentaine, nice to meet you.

    Je suis en ce moment dans une cellule d’isolement. Force à tous ceux qui sont dans ce cas. La fenêtre s’ouvre à peine suffisamment pour passer la main, ni un oiseau ni un singe et, malgré tout le respect que j’ai pour eux, j’ai l’impression d’être un animal dans un zoo. Drôle de situation quand un directeur vient vous accueillir à votre arrivée en disant : « alors, c’est vous ? », avec le regard que l’on pourrait porter sur un lion domestiqué ou non domestiqué dans une cage.

    Ces bleus, ces humains qui ne le sont que très peu au quotidien, agents et acteurs d’un racisme structuré

    S’adapter, ne pas s’habituer. J’ai vu au cours des années des détenus flancher psychologiquement, répondre à la violence institutionnelle (quand elle n’est qu’institutionnelle, ce qui est extrêmement rare), par la violence physique, souvent contre eux-mêmes, trop souvent contre eux-mêmes d’ailleurs. À l’égard des bleus, parfois ces bleus, ces humains qui ne le sont que très peu au quotidien, agents et acteurs d’un racisme structuré, nous les noirs ris de leurs blagues racistes de leurs collègues. Ces gens, ces bleus, très souvent instables, qui laissent libre cours à leur base instable à l’ombre de ce système panoptique, où force n’est pas à la loi, puisque ces lois ils les bafouent en permanence et que le détenu qui aurait l’outrecuidance de s’emparer de ces lois pour tenter de se défendre (je dis bien tenter) est immédiatement estampillé procédurier et les vexations ne font que se multiplier.

    Que dire des piqûres ? De la camisole chimique ? Que dire des décès ? Des meurtres maquillés en suicides ? De l’instrumentalisation de la bassesse humaine ? De l’utilisation des détenus contre d’autres détenus ?

    Et lorsque l’on a dit tout cela, que dire des QI ? J’y suis depuis six ans. On m’accuse d’être un roc, de ne pas faiblir, de ne pas craquer, d’être trop peu impacté après toutes ces années. Qu’on se le dise, je n’ai pas l’intention d’abdiquer : routine exigeante émaillée d’effractions de la part de soldats, plus exactement de marionnettes de l’injustice.

    L’instrumentalisation d’événements au profit du tout sécuritaire… Des débats contradictoires pour donner à tout cela un semblant de cadre légal. Pour ma part, je dis une chose simple quant à ces débats. Dire à son empoisonneur : « je connais ta recette » est inutile, puisqu’il ajoutera toujours un nouvel ingrédient à son poison. Lorsqu’on nous empoisonne, la meilleure façon de ne pas mourir, c’est d’arrêter de manger. Il faut donc ne plus accepter de subir. Stimulez votre intellect, maintenez votre physique en bon état, résistez de la manière la plus adaptée à votre situation… peu importe la manière et peu importe cette situation.

    Un grand salam à L’Envolée que je lis depuis longtemps, à qui je n’ai jamais écrit. C’était une présentation, peut-être que d’autres courriers suivront. Dans tous les cas, je ne souhaite pas que mon identité soit donnée si ce courrier devait être publié. Un grand big up de l’ombre pour les gens à la lumière, prenez soin de vous, je vous souhaite de sortir dans le meilleur état possible.

  • Hospitalisé et en grève de la faim : lettres de Libre Flot

    Hospitalisé et en grève de la faim : lettres de Libre Flot

    Le 27 février 2022, Libre Flot a entamé une grève de la faim contre son incarcération et sa mise en isolement. Il a exposé ses raisons dans un texte que l’on peut relire ici, puis dans un message publié au 17e jour de sa grève de la faim. Le 24 mars, il a été hospitalisé à l’Établissement public de santé national de Fresnes (EPSNF), autrement dit une prison-hôpital. Le 29 mars, l’AP (administration pénitentiaire) a enfin levé son régime d’isolement, mais il restait incarcéré et dans un état de grande faiblesse.

    Peu avant et pendant son hospitalisation à l’EPSNF, Libre Flot a envoyé plusieurs textes pour donner de ses nouvelles, réagir à certaines émissions qu’il avait écoutées et revenir sur les raisons qui poussent l’État à s’acharner contre lui. Nous reproduisons ces textes ci-dessous.

    Libre Flot a interrompu sa grève de la faim au bout de trente-six jours, et il a obtenu une libération pour « raison médicale » deux jours après. Il est donc dehors, mais toujours en attente de son jugement. Toutes les infos sur les sept personnes mises en cause en même temps que lui, aujourd’hui en liberté surveillée, sont à lire .


    « Merci pour le bordel qui, vous l’avez prouvé, peut être joyeux »

    Lettre lue à l’émission du 1er avril 2022.

    Maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, quartier d’isolement,

    Le 19 mars 2022

    Salut l’équipe,

    Juste un rapide coucou en passant, qui ne reflète pas la gratitude à l’égard du soutien que vous m’apportez. Merci pour cette émission que vous m’avez en grande partie dédiée et pour le bordel qui, vous l’avez prouvé, peut être joyeux. Une petite rectification : hier, je n’ai pas eu d’entretien avec le directeur des détentions. Nous nous sommes juste croisés et avons échangé quelques mots dans le couloir à mon retour de l’UCSA (Unité de consultations et de soins ambulatoires).

    Je voudrais remercier Pierrot pour son introduction et pour son analyse fine. Le rapprochement avec la situation en Ukraine, les volontaires, est quelque chose que je ressens depuis un bout de temps mais que je n’avais pas encore mis par écrit. Ça m’a fait plaisir d’entendre son constat, judicieux.

    Bien qu’en toute franchise, j’ai été ravi de toute cette attention qui me touche réellement, je suis un peu désolé d’avoir tant empiété sur le temps initialement prévu pour les « Grands frères » de Guadeloupe. Mais je n’ai aucun doute que vous transmettrez sous peu leur parole. Je les salue et leur envoie toute ma détermination, ainsi qu’à tou·te·s les enfermé·e·s.

    Salutations & respects,

    Libre Flot


    « À vous, volontaires internationalistes qui partez combattre en faveur de l’autodéfense de l’Ukraine »

    Lettre lue à l’émission du 25 mars 2022.

    Maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, quartier d’isolement,

    Le 21 mars 2022

    À vous, volontaires internationalistes qui partez combattre en faveur de l’autodéfense de l’Ukraine,

    L’actualité en Ukraine et les engagements individuels de certain·e·s résonnent étrangement avec les engagements des volontaires contre Daesh. Je ne m’adresse pas aux militant·e·s d’extrême droite, aux idéologies basées sur la haine de l’autre, mais à vous, volontaires internationalistes qui partez combattre en faveur de l’autodéfense de l’Ukraine par amour de la vie. À vous qui aujourd’hui êtes encensé·e·s par les médias et les politiques, sachez ceci : si vous êtes des militant·e·s politiques, vous êtes les potentiel·le·s terroristes de demain car, à votre retour, tout comme moi qui ai rejoint les Unités de protection du peuple (YPG) et combattu les barbares daeshiens, cette expérience sera une épée de Damoclès que la DGSI et le gouvernement feront planer au-dessus de vos têtes. Vous serez sûrement épié·e·s et surveillé·e·s, toute votre vie pourra être redessinée, réécrite, réinterprétée et de simples blagues pourront devenir des éléments à charge lorsque ces institutions auront décidé de vous instrumentaliser pour répondre aux besoins de leur agenda politique.

    Depuis le 27 février, je suis en grève de la faim pour que l’on cesse de me traiter comme les terroristes contre lesquels j’ai combattu et ce, dans l’indifférence des médias et des politiques, sous une chape de plomb semblable à une pierre tombale. Je finirai par ces mots d’anarchistes ukrainien·ne·s :

    "Liberté aux peuples, mort aux empires !"

    Libre Flot


    « J’espère que la violence absurde, bornée et illégitime que je subis se sache et puisse prendre fin »

    Lettre lue à l’émission du 1er avril 2022.

    EPSNF,

    Le 26 mars 2022

    Salut à vous,

    Je me suis aperçu qu’à l’émission d’hier, vous n’avez pas été informé de mon transfert en hospitalisation à l’EPSNF en date du 24 mars. Je suis toujours dans un statut d’isolement, et reste 24H/24 dans ma cellule car mon cœur n’est pas fiable pour sortir. Je suis toujours en grève de la faim, sous perfusion de sérum physiologique et branché en permanence à un électrocardiogramme pour sonner l’alarme en cas de crise cardiaque. On me donne aussi quelques vitamines.

    En tous cas, le personnel est sympa et bienveillant, même s’iels ne sont pas là et n’ont pas le temps de papoter. C’est agréable en plus de voir des gen·te·s souriant·e·s, être considéré comme autre chose qu’un détenu.

    Le personnel de la pénitentiaire d’ici a réussi a faire ramener mon poste de radio, et cc’est vraiment pas du luxe. Je peux continuer à écouter mes émissions héhé, dont la vôtre. Car même si là, il y a la télé gratos, je n’arrive toujours pas à trouver quoi que ce soit à regarder. Toujours la même chose en boucle, des pubs, et la même chose encore et encore, du superficiel, de l’abrutissement.

    Du coup, ça va, bouquins, radio, méditasiestes en grandes quantités.

    Voilà pour mes nouvelles, j’espère que la censure ou tout du moins le silence médiatique va cesser, et que la violence absurde, bornée et illégitime que je subis se sache et puisse prendre fin.

    Libre Flot


    « Hier c’était rude, aucune énergie »

    Lettre lue à l’émission du 1er avril 2022.

    EPSNF,

    Le 27 mars 2022

    Salut,

    Pfff ! Hier c’était rude. Aucune énergie. Même lire était au-delà de mes forces. J’ai pu recevoir une visite : une seule personne avec pass sanitaire. Trop bien, mais je n’ai pas pu en profiter pleinement vu mon état. J’espère qu’aujourd’hui je serai au moins apte à bouquiner. J’ai cru comprendre que j’allais enfin, après tant de temps, pouvoir écrire, téléphoner, voir une personne, aimer. Quelle hâte !

    Salutations & respects,

    Libre Flot

  • Lettre d’Itziar extradée à Madrid – l’acharnement contre Kémi à Saint-Maur continue – fin du compte-rendu du procès des matons violents de Lille-Sequedin

    Lettre d’Itziar extradée à Madrid – l’acharnement contre Kémi à Saint-Maur continue – fin du compte-rendu du procès des matons violents de Lille-Sequedin

    Émission de L’Envolée du vendredi 28 octobre 2022
    • Lettre d’Itziar, écrite depuis une prison de Madrid dans laquelle en vient d’être extradée. Elle a réussi à ne pas se faire saisir le n°55 de L’Envolée en se moquant bien des maton·ne·s de Rennes avant de partir. Elle souligne que dans les prisons de l’État français comme celles de l’État espagnol, l’enfermement reste la même galère. Elle se réjouit enfin de la récente libération de Jakes Esnal et de Ion Kepa Parot, grâce à la mobilisation massive de la société basque depuis des années.

    • Lettre de Mickaël G., alias Kémi, datée du 13 septembre quelques jours avant son tabassage par les matons du QI de la centrale de Saint-Maur. Il ressent pourtant déjà très bien que la pression commence à monter et qu’on cherche à lui faire la misère. Il constate que ses courriers sont régulièrement bloqués, particulièrement ceux qui lui permettent d’avoir des informations concernant la mort de Romain Leroy, qui était l’un de ses amis de détention quand tous les deux étaient à Réau.

    • Lecture du communiqué public « Mickaël G. est en danger à la centrale de Saint-Maur« , publié ce vendredi 28 octobre par le Comité des proches de Mickaël G. concernant les conditions de détention insupportables qu’il subit. Le comité demande de le faire circuler au maximum ! On peut les contacter par mail : lesamisdemickaelg@gmail.com

    • Fin du compte-rendu du procès à Lille de matons qui ont passé à tabac un prisonnier, nu et seul dans sa cellule, le 3 janvier 2022 à la prison de Lille-Sequedin. On discute de la défense des matons qui, pour se protéger, évoquent cette nouvelle expression du soi-disant « effet-tunnel« , dont on avait déjà entendu parler à propos des matons qui ont tué Sambaly Diabaté, mais aussi suite à des personnes tuées par les keufs.

    • Discussion sur le budget 2023 du ministère des tribunaux et des prisons, toujours à la hausse.

    Musiques : Futuristiq, Réalité / Intouchable, Je ne dors plus (remix) / Lesram, Wesh enfoiré

    L’Envolée est une émission pour en finir avec toutes les prisons. Elle donne la parole aux prisonniers, prisonnières et leurs proches & entretient un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur des prisons. C’est aussi un journal d’opinion de prisonniers, de prisonnières et de proches.

    On manque de forces pour faire tourner l'émission radio comme on le souhaiterait en ce moment : que vous soyez prisonnier·e·s, proches, ou révolté·e·s contre l'enfermement et l'AP n'hésitez pas à nous contacter et à passer le mot !

    Direct chaque vendredi de 19h à 20h30 sur FPP 106.3 en région parisienne et MNE 107.5 à Mulhouse, RKB 106.5 en centre-Bretagne lundi à 22h, Radio Galère 88.4 à Marseille le jeudi soir à 20h30, PFM à Arras et alentours 99.9 mardi à 21h30, Canal Sud 92.2 jeudi à 17h30 à Toulouse, L’Eko des Garrigues 88.5 à 12h le dimanche à Montpellier, Radio U 101.1 le dimanche à 16h30 à Brest, Radio d’Ici 106.6 à Annonay mardi à 21h30 et 105.7 FM & 97.0, à Saint-Julien-Molin-Molette dimanche à 20h et sur les webradios Pikez (dimanche à 11h) et Station Station (lundi à 13h). Podcasts disponibles sur toutes les plateformes !

    Pour nous joindre : 07.53.10.31.95 (appels et textos). Pour écrire : Radio FPP – L’Envolée, 1 rue de la solidarité, 75019 Paris, ou encore à contact@lenvolee.net et sur instagram, twitter, facebook.

    L’abonnement au journal est gratuit pour les prisonniers et les prisonnières. Le numéro 55 est dispo et déjà censuré par l’Administration pénitentiaire ! Raison de plus pour le faire tourner !

    Notre bouquin pour troubler la fête du quarantième anniversaire de la prétendue abolition de la peine de mort est sorti ! Une manière parmi d’autres, que nous espérons nombreuses, de faire entendre quelques voix dissonantes dans l’écœurante auto-célébration du pouvoir.

    Ce livre réunit des paroles de prisonniers, de prisonnières et de proches publiées dans le journal depuis sa création en 2001 qui nous rappellent avec force qu’en réalité c’est seulement la guillotine qui a été supprimée en octobre 1981.

    Il est disponible dans toutes les bonnes librairies et sur la boutique de nos ami·e·s des éditions du bout de la ville.

    Il est gratuit pour toutes les personnes enfermées : écrivez-nous à contact@lenvolee.net pour que nous puissions le faire parvenir à vos proches emprisonné·e·s !

  • Pressions contre Kémi à Saint-Maur – procès de matons violents à Lille-Sequedin – résistances des prisonnières au CRA du Mesnil-Amelot

    Pressions contre Kémi à Saint-Maur – procès de matons violents à Lille-Sequedin – résistances des prisonnières au CRA du Mesnil-Amelot

    Émission de L’Envolée du vendredi 21 octobre 2022
    • Évasion collective de 9 prisonniers au CRA de Oissel, près de Rouen.
    • Des nouvelles de Kémi, qui continue à se prendre des pressions à la centrale Saint-Maur pour le pousser à bout. N’hésitez pas à appeler la prison de Saint-Maur pour leur dire d’arrêter, et vous pouvez passer par nous pour écrire à Kémi et lui envoyer de la force.
    • Retour sur le procès à Lille de matons qui ont passé à tabac un prisonnier, nu et seul dans sa cellule, le 3 janvier 2022 à la prison de Lille-Sequedin. Il s’est pris des coups de pied et de poings, a été strangulé, a été tiré par les bras menottés dans le dos, se prend des coups à chaque marche d’escalier dans lequel il est traîné. Il est laissé inerte au mitard et ne reçoit aucun soin pendant plusieurs jours. Les matons écrivent un faux CRI et vont essayer de faire passer le prisonnier pour fou et l’envoient 48h à l’UHSA. Le prisonnier et son codétenu témoin sont mis sous pression. La défense des matons pour se dédouaner repose sur un soi-disant « effet-tunnel« . L’AP les félicite et les matons n’ont eu aucune sanction administrative ; le délibéré du procès est prévu pour novembre.
    • Appel de plusieurs prisonnières enfermées au CRA du Mesnil-Amelot. Elles subissent des blocages dans la distribution des produits d’hygiène, de la nourriture et de l’argent. Elles n’ont aucun soin gynéco. Les punaises de lit prolifèrent dans le CRA. Le covid et la variole du singe aussi ; l’une des prisonnières ayant eu le covid a été mise en isolement chez les hommes. Elles subissent des fouilles des hommes de la PAF. Désormais un OPJ est présent en permanence dans le CRA. Mais la résistance et la complicité des prisonnières fait plaisir à entendre !

    Agenda :

    L’Envolée est une émission pour en finir avec toutes les prisons. Elle donne la parole aux prisonniers, prisonnières et leurs proches & entretient un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur des prisons. C’est aussi un journal d’opinion de prisonniers, de prisonnières et de proches.

    On manque de forces pour faire tourner l'émission radio comme on le souhaiterait en ce moment : que vous soyez prisonnier·e·s, proches, ou révolté·e·s contre l'enfermement et l'AP n'hésitez pas à nous contacter et à passer le mot !

    Direct chaque vendredi de 19h à 20h30 sur FPP 106.3 en région parisienne et MNE 107.5 à Mulhouse, RKB 106.5 en centre-Bretagne lundi à 22h, Radio Galère 88.4 à Marseille le jeudi soir à 20h30, PFM à Arras et alentours 99.9 mardi à 21h30, Canal Sud 92.2 jeudi à 17h30 à Toulouse, L’Eko des Garrigues 88.5 à 12h le dimanche à Montpellier, Radio U 101.1 le dimanche à 16h30 à Brest, Radio d’Ici 106.6 à Annonay mardi à 21h30 et 105.7 FM & 97.0, à Saint-Julien-Molin-Molette dimanche à 20h et sur les webradios Pikez (dimanche à 11h) et Station Station (lundi à 13h). Podcasts disponibles sur toutes les plateformes !

    Pour nous joindre : 07.53.10.31.95 (appels et textos). Pour écrire : Radio FPP – L’Envolée, 1 rue de la solidarité, 75019 Paris, ou encore à contact@lenvolee.net et sur instagram, twitter, facebook.

    L’abonnement au journal est gratuit pour les prisonniers et les prisonnières. Le numéro 55 est dispo et déjà censuré par l’Administration pénitentiaire ! Raison de plus pour le faire tourner !

    Notre bouquin pour troubler la fête du quarantième anniversaire de la prétendue abolition de la peine de mort est sorti ! Une manière parmi d’autres, que nous espérons nombreuses, de faire entendre quelques voix dissonantes dans l’écœurante auto-célébration du pouvoir.

    Ce livre réunit des paroles de prisonniers, de prisonnières et de proches publiées dans le journal depuis sa création en 2001 qui nous rappellent avec force qu’en réalité c’est seulement la guillotine qui a été supprimée en octobre 1981.

    Il est disponible dans toutes les bonnes librairies et sur la boutique de nos ami·e·s des éditions du bout de la ville.

    Il est gratuit pour toutes les personnes enfermées : écrivez-nous à contact@lenvolee.net pour que nous puissions le faire parvenir à vos proches emprisonné·e·s !

  • « Le médical » en prison : lettres sur l’UCSA, par Libre Flot

    « Le médical » en prison : lettres sur l’UCSA, par Libre Flot

    Dans cette suite de courriers de l’hiver 2021-2022 lus lors des émissions du 10 décembre 2021 (pour la pièce de théâtre) et du 24 janvier 2022 (pour les autres textes), Libre Flot dit l’impossibilité de recevoir des soins décents au QI (Quartier d’isolement) et décrit le mépris du secret médical qui y règne. La santé mentale et psychologique des isolé·e·s ne peut que se dégrader. Non seulement l’AP (Administration pénitentiaire) et les surveillant·e·s connaissent cet état de fait, mais le personnel médical est complice. Avec le soutien de l’UCSA (Unité de consultation et de soins ambulatoire), c’est-à-dire du « médical », L’AP soutient que les souffrances provoquées par le QI sont « normales ».


    Pièce de théâtre en un acte sur l’UCSA

    Maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, quartier d’isolement,

    Décembre 2021

    Salut salut,

    Ceci n’est pas une vraie lettre, juste une envie de partager un événement banal du petit théâtre du quotidien en un unique acte. C’est une visite de l’UCSA.

    Scène 1

    [Le rideau se lève sur une cellule. Une personne est penchée sur son bureau, étudiant des documents. Un bruit de clés actionnant une serrure retentit fortement. La personne se lève, saisit un masque, l'enfile pendant que la porte s'ouvre.]

    Scène 2

    [Derrière la porte, dans le couloir, se trouvent deux personnes en blouse blanche (une doctoresse, jamais vue par le détenu, et une infirmière) et deux autres en uniforme bleu foncé (surveillant et gradé). Chacun·e reste de son côté de la porte durant toute la scène.]
    [La doctoresse.] Bonjour c'est l'UCSA, vous allez bien ?
    [Le détenu.] Mouais, c'est comme d'habitude.
    [La doctoresse.] Ah. Ça veut dire que ça va alors.
    [Le détenu.] Non, ce que je veux dire c'est que j'ai toujours de fortes douleurs aux articulations, tout particulièrement aux genoux et aux poignets.
    [La doctoresse fait style d'écrire sur un document, mais c'est trop rapide pour être plus qu'une croix ou deux. Elle reprend.] Ah, c'est parce que vous ne faites pas assez de sport.
    [Le surveillant.] Ça, non. Il en fait bien du sport !
    [La doctoresse.] Alors c'est parce que vous en faites trop. Passez une bonne journée.
    [La porte se referme, le rideau tombe sur le détenu.]
    

    Voici une scène 100% véridique, et rien n’a été omis ou rajouté de ce que j’ai perçu. Cette visite n’a rien d’extraordinaire, elle est d’une banale réalité. Et qu’est-ce qu’on peut en retirer ?

    • Pour l’UCSA ces visites sont des visites de routine, et c’est le cas. Tout va toujours bien selon eux, tant que l’on ne dit pas de manière appuyée que ça ne va pas. Ces visites doivent aller le plus vite possible, il faut un réel effort au détenu pour avoir une oreille attentive. Effort d’autant plus difficile quand ça ne va pas.
    • L’intention du surveillant, même si elle partait d’un bon sentiment, démontre le non-respect du secret médical.
    • Et au final, la visite n’a servi à rien. J’ai mal ? Bah, c’est de ta faute, on s’en fout.

    Voilà, je voulais juste vous partager ça, tant que je l’avais en tête. Je vous écrirai une vraie lettre pour répondre à celle que vous m’avez envoyée et que je n’ai pas encore reçue. Au plaisir de vous lire et de vous écouter,

    Salutations & respects,

    Libre Flot


    « Ce n’est hélas pas étrange que des personnes, pour en faire le moins possible, annulent les soins des personnes isolées »

    Maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, quartier d’isolement,

    Le 31 décembre 2021

    Salut, salut,

    Un petit coucou pour vous donner quelques nouvelles :

    • Après des mois de plaintes répétées à propos de douleurs articulaires, on m’a filé un rendez-vous avec un·e kiné, puis un·e autre puisque le premier n’a pas eu lieu et j’espère en avoir un autre bientôt puisque le second n’a pas eu lieu non plus. La cause ? Je suis au QI !
    • Et le dentiste ? Merci au sentiment de culpabilité… Je m’explique : comme d’hab’, j’ai rendez-vous, les surveillant·e·s et le/la gradé·e sont au courant et je ne vois rien venir… Le matin, je vais à l’opprimenade du QI (c’est dans le même couloir) en précisant : « Si le dentiste appelle, vous me sortez et m’y amenez. – Oui, oui ». Début d’après-midi, on m’amène à la salle de sport, je précise : « Si le dentiste appelle, vous me sortez et m’y amenez ». À ce moment, le/la gradé·e me dit que le rendez-vous n’aura pas lieu, que le/la dentiste ne peut pas me recevoir. Dépité, ça se voit un peu sur ma tronche, je lui dis que c’est comme d’habitude, que mes rendez-vous sont toujours repoussés, celui-ci depuis quatre mois, qu’hier encore celui du kiné aussi… Et là je découvre sur son visage comme un malaise (mal à l’aise), un air un peu gêné, comme une once d’empathie mêlée à de la culpabilité. Je fini le sport, iel me dit qu’il a rappelé le/la dentiste, qu’iel a fait pression pour que mon rendez-vous soit honoré… Oui oui, c’est un peu gros, iel en fait trop c’est pas crédible. Quelques minutes après j’apprends par le personnel médical que mon rendez-vous était ce matin et que le personnel de l’AP (c’était le/la même gradé·e le matin) avait déclaré que je n’irai pas à mon rendez-vous. Bon évidemment, comme mon rendez-vous (qui devait être le dernier) ne s’est pas déroulé au moment prévu, ça foutait la « merde » à l’UCSA et suite à un cognage de porte et à un échange non-verbal que je n’ai pas pu voir à cause de ma posture, ma consultation s’est finie plus vite que prévu (selon ma perception) et un autre rendez-vous m’a été redonné. Bon en tous cas, là où j’avais le plus mal a été rebouché !
    • Donc oui je remercie le sentiment de culpabilité car ce n’est hélas pas étrange que des personnes, pour en faire le moins possible, annulent les soins des personnes isolées. Encore moins étrange quand on sait que ce·tte même gradé·e, peut-être pour éviter le surmenage, a tendance à « oublier » d’emmener les personnes en opprimenade ou en les « oubliant » dedans, ou en les « oubliant » dans la salle de sport, ou en les « oubliant » dans la douche… Comme si l’enfermement, ou régime d’isolement n’était pas suffisant, il faudrait encore nous faire galérer toute la journée à poireauter… C’est vrai qu’on est chiant à vouloir profiter de tous ces fantastiques bienfaits et ces nombreuses activités auxquelles on a droit, on veut sortir, rentrer, se dépenser, se laver et même retourner s’instruire en cellule… Mince cela l’oblige à faire son travail ! Peut-être espère-t-iel qu’en nous faisant subir toutes ses attentes abusives, on se lasse reste enfermés en cellule 24H/24 et lui permette de se tourner les pouces ? Raté !
    • Sinon, lundi dernier, j’ai pu constater le retour des Plexiglas au parloir. (Au moins, y a plus cette table qui prenait toute la place). D’ailleurs, en lisant certains témoignages d’autres détenu·e·s dans L’Envolée, il est question « d’intimité » lors des parloirs. Ici à Bois l’Arsouille, d’intimité, il n’y en a point ! Les parloirs d’architecture panoptique sont vitrés des deux côtés où circulent en permanence surveillant·e·s qui épient sans cesse.

    Je termine cette lettre-là pour qu’elle parte ce matin, je vous écoute ce soir (sûrement une émission enregistrée). Merci à vous pour votre soutien. Courage à tou·te·s les enfermé·e·s et leurs proches.

    Salutations & respects,

    Libre Flot


    « Rien ne s’est amélioré. Cela ne se peut sans l’élimination des causes provoquant les maux. »

    Maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, quartier d’isolement,

    Le 13 janvier 2022

    Salut à vous tout·e·s !

    Juste un petit coucou pour vous partager une réflexion sur le langage utilisé par l’UCSA pour dédouaner l’Admin’ Pen’ des conditions inacceptables de la détention en QI. N’ayant pas envie de passer quinze ans dessus (et d’ailleurs l’écriture devenant de plus en plus difficile), la forme de ce bref texte peut être un peu lourd et redondant, tout en simplifiant et réduisant des processus de réflexion, toujours est-il, et c’est le principal, que l’on comprendra aisément je l’espère le fond et le sens des propos.

    En ce qui concerne ma situation, je ne m’étalerai pas sur mes différents « soucis » (moi aussi j’utilise les euphémismes) médicaux, vous comprendrez que rien ne s’est amélioré. Cela ne se peut sans l’élimination des causes provoquant les maux… J’ai juste ajouté à ma routine les exercices conseillés par le kiné.

    Quant à ma détention provisoire, cela fait plus de trois mois que je n’ai pas de nouvelles du juge d’instruction (JI), que rien ne se passe… Récemment lors du renouvellement de mon mandat de dépôt, le juge des libertés et de la détention avait ordonné une enquête de faisabilité pour une « liberté conditionnelle » (je suis pas sûr du terme mais en gros prison à la maison avec bracelet). Cela fait désormais plus d’une semaine que nous savons que le JI a la réponse, que mes avocat·e·s ont demandé qu’on le leur transmette… mais rien. Encore une fois, le JI fait durer le « plaisir ». Cela ne pourra pas, dommage pour lui, durer éternellement. Pendant ce temps, je ne peux que constater ses pratiques humanistes.

    Voilà pour aujourd’hui, au plaisir de vous écouter et de vous lire ! Merci encore pour votre soutien à tou·te·s les enfermé·e·s et à leurs proches. Force et courage à elleux et spécialement aux isolé·e·s.

    Salutations & respects,

    Libre Flot

    Souffrances acceptées et voulues par l’Admin’ Pen’ ou ses commanditaires. C’est ce qu’on appelle la torture.

    Après quatre mois de plaintes répétées à propos de douleurs généralisées aux articulations, j’ai enfin (après 3 rendez-vous repoussés) vu le kiné. Verdict ? « C’est normal dans ces conditions ». Étrangement, c’est toujours la même rengaine quels que soient mes maux… Mes maux de tête semi-permanents ? « C’est normal dans ces conditions qu’est l’isolement ». Mes pertes de mémoire, mon incapacité de concentration, la perte de repère spatio-temporels, mes douleurs cardiaques, mon oppression thoracique, mes troubles visuels, mes vertiges, mon hébétude, etc. ? Pareil ! « C’est normal au vu de mes conditions de détention. »

    Dans un environnement normal (et même en détention classique), pourtant, subir l’ensemble de ces maux n’est pas considéré comme chose normale. Y introduire le facteur « Quartier d’Isolement » ne la rend pas plus normale. Tout comme ce que l’on dit avant un « mais » n’a pas vraiment de sens (je ne sais pas…, mais…), définir quelque chose de « normal » mais uniquement sous des conditions spécifiques ôte automatiquement toute notion de normalité. On ne peut dès lors plus parler que de conséquences logiques ou de réactions systématiques. Si le fait d’obtenir les mêmes résultats en prenant n’importe quelle personne et en la plaçant dans une cellule 22 ou 23 heures par jour, sans interaction sociale, est considéré par les médecins de l’UCSA comme « normal au vu des conditions de détention en isolement », cela veut, en fait, dire que ces conséquences, subies par la majorité des personnes en QI, sont donc bien des réactions systémiques et sont aussi très bien connues.

    L’utilisation mensongère du terme « normal » (associé au « dans ces conditions ») est en fait un euphémisme ayant pour but de masquer la vérité toute simple qui est que la détention au QI provoque de graves souffrances aux individu·e·s. Souffrances tant physiques, cérébrales et psychologiques, qui, étant connues et systémiques, sont donc acceptées et voulues par l’Admin’ Pen’ (ou ses commanditaires). C’est ce que l’on appelle de la torture.

    Le personnel médical, lorsqu’il (ab)use volontairement de cet euphémisme falacieux pour éviter d’énoncer la vérité qu’il connaît, n’œuvre plus à la santé de ses patient·e·s mais leur ment, les trompe, couvrant ainsi les méfaits de l’Admin’ Pen’ et lui permettent ainsi le maintien en isolement, ce qui dégrade profondément les individu·e·s. L’UCSA se rend donc complice de cette torture. Mais bon, on ne mord pas la main qui (même indirectement) nous nourrit…

    « utilisation normale d’un euphémisme médical pour une torture carcérale »

    P.-S. : et oui ! Je vous ai encore glissé quelques phrases à rallonge que vous allez « kiffer » pour une lecture à voix haute… hihihi 😉 (non, non, c’est promis, c’est pas du sadisme !)


  • Covid en prison : quatre lettres de mars 2022

    Covid en prison : quatre lettres de mars 2022

    Le gouvernement a orchestré le mirage d’un prétendu « retour à la normale » avec la fin du passe sanitaire et du port du masque obligatoire en mars 2022 ; mais à l’intérieur, les mesures foireuses que l’AP (Administration pénitentiaire) impose aux prisonnier·e·s depuis deux ans – jamais les mêmes d’une semaine à l’autre ou d’une taule à l’autre – ne tombent pas vite. Prisonnier·e·s et proches n’en peuvent plus de ces mesures arbitraires et vexatoires – notamment au parloir, en salons et en UVF (Unité de vie familiale), seuls moyens de maintenir des liens avec l’extérieur.


    « Souriez, vous êtes matés ! »

    Lettre de l’Infâme

    Cette lettre écrite du QI (Quartier d’isolement) de Valence a été lue à l’émission du 15 avril 2022. On y voit comment l’AP (Administration pénitentiaire) se sert du prétexte du covid pour multiplier les restrictions au parloir et faire subir une surveillance accrue aux prisonniers et à leurs proches tandis que les matons qui vont et viennent librement peuvent faire rentrer le virus. L’Infâme revient sur l’argent promis aux prisonnier·e·s pour appeler leurs proches par téléphone pendant le premier confinement de mars-avril 2020, ce « cadeau» destiné à calmer les révoltes collectives contre l’interdiction pure et simple de tous les parloirs…

    Centre pénitentiaire de Valence, quartier d’isolement,

    Le 14 mars 2022

    Coucou les ami(e)s,

    L’Infâme est de retour, histoire de vous parler un peu du covid et de comment tout se joue autour de ça en ce lieu oppressant déjà, de base, qu’est le quartier d’isolement. De mon point de vue, le sujet covid est un peu spécial, je l’avoue, car je suis encore et toujours « isolé ministériel ». Mais ça n’en reste pas moins violent, révoltant, et parfois même un non-sens ! Mais bon, j’vais – comme à mon habitude –, vous parler sans langue de bois, même si ça pourrait déplaire à l’AP. Mais ce détail-là, je m’en tape comme de ma première chemise, car la libre expression est un droit – et un devoir, même – de l’être humain. Revenons à nos moutons… ou plutôt, à notre covid – toute une histoire, cette merde de covid, hein !

    Vous n’êtes pas sans savoir, vous, à l’Envo (pour celles et ceux qui me sont le plus proches) que, depuis quelques mois, j’ai enfin des parloirs. Et là, le choc ! Mon parloir s’est super bien passé ! Mais côté covid, le parloir, un désastre ! On a fait avec, moi et mes frérots.

    L’ordre qui nous a été donné, c’est zéro contact. Pas même un check du poing, ou même du pied ou alors du coude.

    L’ordre qui nous a été donné, c’est zéro contact. Pas même un check du poing, ou même du pied ou alors du coude. Rien, nada ! Et croyez-moi qu’après presque quinze ans sans parloir, de renouer avec le parloir, j’en étais ému… Mais ne pas pouvoir dans mes bras mes frérots, leur faire la bise, une accolade, etc., c’est d’une violence terrible ! J’aurais voulu passer outre, sauf qu’on était surveillés de près. Et v’là que ça fait des aller-retours, sans cesse, pour noter si on fait un écart ou pas… Alors qu’eux, bien évidemment, se faisaient des checks du poing ! Mais nous, on nous refusait même ça. Moi, j’étais dos à la porte de la cuisine du parloir, et je voyais les frérots lever les yeux, à chaque passage de Big Brother… Souriez, vous êtes matés ! Au sens propre comme au figuré. Une mise à l’amende inacceptable ! Et bien que pas contents de cette flagrante inhumanité qu’on subissait, on s’est pliés malgré tout à ça. Une mise à l’amende inacceptable ! Et bien que pas contents de cette flagrante inhumanité qu’on subissait, on s’est pliés malgré tout à ça.

    Le pire de cette mise à l’amende, c’est qu’on nous a bien signifié que, si on avait le moindre contact, que ce soit à l’initiative de mes visiteurs ou à la mienne, non seulement il serait mis fin à la visite, mais le permis de visite serait non pas suspendu, mais tout simplement supprimé. Et le pire dans tout ça, c’est qu’on ne pouvait rien y faire. Alors la mort dans l’âme, on n’a pas joué aux cons ! Mais c’était d’une violence psychologique extrême tout ça ! Mais, le principal, c’est que ça ne nous a pas empêché de profiter pleinement des trois heures de parloir qu’on a eu ce jour-là.

    Alors, vu les mesures de covid, pour les parloirs ici, à Valence, tenez-vous bien, car l’annonce est aussi rude que révoltante : de base, sans prolongation de durée, la durée d’un parloir, c’est 1h30 ! 3 heures avec une prolongation ! Et le parloir, c’est juste le dimanche. Et quand je dis « le dimanche », c’est pas tout le dimanche, mais une seule session de 1h30 si y a pas de prolongation. Soit le matin, soit l’après-midi.

    Même dans une prison aussi reloue que Condé-sur-Sarthe par exemple, les parloirs, c’est tout le week-end, et les jours fériés. Et toutes les sessions. C’est-à-dire, si la famille, les amis, etc., viennent, ils peuvent faire 3 heures le matin, 3 heures l’après-midi, tout le week-end. Et si le jour qui précède ou succède un week-end est férié, c’est possible de faire la session du matin et de l’après-midi, de faire 3 heures à chaque fois, sur les trois jours entiers.

    Ici, non ! C’est juste le dimanche, soit le matin, soit l’après-midi pour une seule session. Ici, Valence, c’est un CP (Centre pénitentiaire), donc y a une maison d’arrêt. Eux par contre, ils ont droit à plusieurs jours de parloir. Pourquoi pas nous, détenus QMC (Quartier maison centrale) ? Là encore, mystère et boule de gomme, au goût de révolte ! Et pourtant, y a personne côté centrale qui se bouge son cul pour s’insurger contre ça. Pas de bloquage, pas de mouvement de contestation, pacifique ou non. Rien, zéro ! Suis-je le seul à ne pas trouver ça ni acceptable, ni normal ? J’en ai bien l’impression ! Pfff, des moutons qui se sont laissés abrutir par le système ! Et par les miettes qu’on nous a données, par de prétendues « volontés » de maintenir des liens familiaux – par exemple avec le téléphone, où on nous donnait des clopinettes, du genre : « Estime-toi heureux, on te file 30 balles de téléphone gratis ! Appelle chez toi et ferme ta gueule ! » Ben non, désolé, moi, j’ferme pas ma gueule !

    Je pense qu’il y en a qui se sont gavés sur nous !

    Je sais pas si vous vous rappelez, les mesures prises par les politiques, c’était à la base 40€ par mois pour la téléphonie. Et d’un coup d’un seul, 40€ pour nous, les enfermés, les invisibles, les anonymes parmis les anonymes, 40€ c’était c’était bien trop, et sans que personne, de nous, détenus, ne sache vraiment comment, ni par qui tout cela s’est décidé, c’est redescendu à 30€ ! Vu que l’État, à la base, envoyait « une enveloppe-budget » pour les opérateurs de l’époque Sagi et Telio et que ces opérateurs ensuite répartissaient automatiquement, pour chaque prison et pour chaque prisonnier déterminé, la somme liée à la téléphonie, je pense qu’y en a qui se sont gavés sur nous ! Car on est combien de détenus en France ? 74, 75, 76.000 ? Mais à 10€ par tête, chaque mois, y a un champion bien avisé qui se foutait alors 10€ multiplié par le nombre de détenus en France dans la poche, ça veut dire ? Quel détenu en a été informé du pourquoi, du comment ? Pas moi en tout cas ! On s’est bien fait enfler, par des escrocs en col blanc, qui, pendant une X période, se sont mis 10€ multiplié par le nombre de détenus dans la poche ! Et ce sont vous, mesdames messieurs du dehors, qui payez avec vos impôts, avec toutes les taxes que vous donnez à l’État au quotidien. C’est votre argent, pas le nôtre, étant donné que nous, en prison, sommes rarement imposables.

    J’ai jamais entendu que ces clampins avaient été inquiétés par la Justice. Et pourquoi ? Tout simplement parce que, hormis certains détenus et certaines personnes qui luttent pour nous au dehors, personne n’en a rien à foutre que ces gens se gavent tant sur votre dos que sur le nôtre ! Libre à chacun de faire comme ces trois singes : j’ai rien vu, j’ai rien entendu, et je parle pas. Mais moi, je suis pas un singe ! Ni je ferme ma gueule, ni je deviens sourd quand ça se complique, ni je ferme les yeux sur ce qu’on nous fait. Car, ce qu’on nous fait à tous, détenus, on vous le fait à vous aussi au dehors, vous qui n’avez aucun lien quel qu’il soit avec le milieu pénitentiaire, car c’est aussi et surtout à vous que je m’adresse car nos proches ou ceux qui luttent à nos côtés, eux, savent. Ils font ce qu’ils peuvent pour aider, que ce soit par exemple en faisant entendre nos voix à nous les oppressés du système carcéral qui broie de l’humain et leur famille ! Mais, que vous le vouliez ou non, vous qui n’avez aucun lien direct ou indirect avec un détenu ou le milieu carcéral, vous êtes vous aussi tout autant impactés que nous ! Bien qu’il y ait des gens formidables, comme ceux et celles qui forment l’Envolée, bien qu’il y ait aussi d’autres assoces qui luttent tout comme l’Envo pour nous détenu(e)s, retenu(e)s que ce soit en prison ou dans tous les lieux où on enferme (à ceux-là, force et courage, aux femmes et hommes enfermé(e)s entre autres dans ces maudits centres de rétention administrative), ou que ce soit aussi nos proches… Certes tout ce monde, ça en fait des gens qui luttent pour nous, mais on est encore trop peu nombreux ! À vous toutes et tous, sentez-vous concernés et vous aussi, prenez position, car on a tous et toutes besoin de vous aussi ! Vous comme moi, on est tous des êtres humains avant tout ! Vous, mesdames, messieurs, si c’était vous qui subissiez ce genre de choses, l’accepteriez-vous ? Et, si vous ne l’acceptiez pas si vous étiez à ma place, pourquoi pas d’ores et déjà, en l’état actuel des choses ? Dites non et insurgez-vous, selon ce que vous pouvez, soutenez les personnes qui subissent ce broyage psychologique et physique !

    Pourquoi acceptez-vous ou même, pourquoi préférez-vous fermer les yeux, les oreilles et la bouche, alors que ça se passe ici en France ? Et à celles et ceux qui liront ceci, vous y penserez peut-être le jour où vous vous ferez agresser par un délinquant qui récidive : à mon niveau, ai-je fait ma part citoyenne en soutenant comme je le peux pour faire avancer les conditions des détenus ? Car si j’avais été là pour aider du mieux possible, peut-être que celui qui cambriole ou qui vend de la came à mon gamin aurait trouvé son chemin dans la droiture ! Au lieu de ça, il a subi, s’est endurci de la plus mauvaise des façons, et j’ai, en un sens, contribué à cela en ne faisant rien, en me complaisant dans mon petit train de vie, parce que je ne me sentais pas concerné. Ce que je vous dis là, ce sont de vraies réalités, c’est pas juste des élucubrations d’un mec qui aurait perdu la tête !

    Tout simplement, ces mesures, en ce qui concerne les parloirs, c’est juste pour nous oppresser sans que rien ne le justifie !

    Autre sujet les amis, par exemple, les salons ou UVF… Par exemple, entre le jour où j’ai eu mon premier parloir et mon premier salon, il ne s’est passé qu’un mois. Cool ! Ça dure 6 heures toute la session « du matin jusqu’au soir », 10h30-16h30, dans un genre d’appart aménagé ! Là, j’ai pu embrasser mes frérots, leur faire de grosses accolades, etc. Mais question : pourquoi alors nous menacer, pour les parloirs, de nous faire sauter le permis vu qu’au salon, on pouvait faire ce qu’on nous interdit au parloir ? Ben tout simplement parce que ces mesures, en ce qui concerne les parloirs, c’est juste pour nous oppresser sans que rien ne le justifie ! Normalement, à l’issue d’un UVF, ou d’un salon, il devrait y avoir une période de pfff… je sais même pas combien, car même ici, ils savent pas tellement ça change tout le temps de confinement obligatoire ! Moi, je savais que les frérots n’avaient pas le covid, donc je pouvais pas l’avoir à l’issue du salon. J’ai demandé, juste pour voir ce qu’on répondrait, si je pouvais (comme je le fais souvent) aller en salle de bibliothèque pour écrire mes courriers. « Prépare-toi, on arrive dans cinq minutes », m’a t-on dit, alors que tous savaient que je rentrais du salon. Au bout de trois minutes je les appelle et je les bluffe en leur disant : tout compte fait je dois appeler chez moi, j’reste en cellule. En fait, je me suis auto-confiné moi même dix jours pour être sûr.

    Les surveillants nous rappellent sans cesse qu’il faut respecter les gestes barrière alors que ça contamine sans vergogne, ni souci de conscience les détenus, parce que, eux, n’ont pas respecté les gestes barrière !

    Un détenu a eu le covid ici, au QI, et pourtant il n’a pas eu le covid lors s’un salon ou d’un UVF ou d’un parloir ! Au QI, nos contacts se limitent la plupart du temps aux surveillants. Il a des mesures de gestion équipée, donc ils ouvrent peu sa cellule. Il a eu des contacts qu’avec les surveillants et personne d’autre, donc c’est un surveillant qui lui a refilé le covid. Et, aucun détenu n’a été informé que l’un d’entre nous l’avait chopé à cause d’un surveillant, quelle honte ! Ils nous mettent en danger, mais par contre ils nous rappellent sans cesse qu’il faut respecter les gestes barrières alors que ça contamine sans vergogne, ni souci de conscience les détenus, parce qu’eux n’ont pas respecté les gestes barrières ! On sait même pas si c’est un surveillant QI qui lui a donné cette merde de covid, ou un Elac (Équipe locale d’appui et de contrôle) ! Car c’est les Elac qui font les mouvements infirmerie par exemple, quand on va à l’infirmerie ou dès qu’on sort du bâtiment du QI, donc non seulement ça a infecté un détenu, mais que dire de cet inconscient d’agent qui, de ce fait, a mis aussi ses collègues à lui en danger, peut-être même aussi ses proches. À cette période, ce détenu n’avait pas de parloir, de salon, ou d’UVF prévu : imaginez si ça avait été le cas, et qu’il ait eu une visite, avant même d’avoir été depisté positif ! Ce mec a des gamins, et s’il avait infecté ses gamins sans le savoir s’il avait eu parloir ? C’est-à-dire que de l’inconscience d’un seul surveillant, vous imaginez un peu comment tout ça aurait pu mal tourner.

    Et là, depuis 24 heures, plus personne ne met de masques. Est-ce général et/ou généralisé ? Mystère et boule de gomme ! Au QI, personne ne nous a informés de quoi que ce soit à ce sujet ! Alors, les Castex, Vérand, Macron et compagnie, au lieu de filer des chèques carburants et qu’ça foute la pagaille, au lieu de faire profil bas Olivier, et de pas remplir ton rôle de ministre, et toi Manu, au lieu de t’la raconter comme un Superman que t’es pas en voulant donner des leçons à ce fou de Poutine, commencez, messieurs, par vous occuper des vrais problèmes qu’il y a dans votre pays. Regardez d’un peu plus près tout ce qui se passe dans les prisons ! On tombe malade, on crève, que ce soit brutalement ou à petit feu, ce qui n’en n’est pas moins tout aussi brutal que de mourir d’une dizaine de coups de couteau dans une cour de promenade. Parce que, quand il y a des détenus « médiatiques et médiatisés » là vous commencez à bouger, et même à faire les canards, en transférant les gens là ou ils voulaient être pour être proches des leurs, chose que jusque là vous leurs avez refusé et tout ça, à quel titre, de quel droit ? Celui de l’apaisement des esprits échauffés à blanc ? Et nous alors, nous, les invisibles sauf quand on fait une prise d’otage ou qu’on agresse un surveillant, vous en avez rien à foutre de nous ? Et vous croyez que je vais voter pour des gens comme vous ? Commencez par voir les réalités de ce qui ce passe dans les geôles françaises, les CRA, et tous ces lieux où on enferme et tue de multiples façons, où l’on broie des gens, des familles entières, et faites changer les choses, alors là… peut-être, je dis bien peut-être, voterai-je un jour si un de vous tient de tels engagements !

    À toutes celles et ceux que je nomme pas et qui me soutiennent, activement et/ou, dans l’ombre, ainsi qu’à ma tante et mon oncle qui sont là pour moi, merci à vous pour votre soutien, votre cœur, et votre détermination ! Courage aussi, tout spécialement, à N. « la lionne » incarcérée actuellement aux Baumettes ! À toutes les femmes, hommes, minots, et tous ceux et celles, enfermé(e)s ailleurs qu’en prison, gardez le moral et l’espoir de jours meilleurs ! Force courage et détermination ! Restez unis et solidaires ! Car le combat « c’est nous contre eux, pas nous contre nous ».

    Y a pas d’arrangement, et y en aura jamais là-dessus ! Force à tous.

    L’Infâme


    « Voilà deux ans que le covid a posé ses bagages en prison »

    Lettre de Francis Dorffer

    Chaque fois que des mesures répressives sont mises en place au détriment des prisonnières et des prisonniers, ou de leurs proches, le risque, c’est qu’elles s’inscrivent dans le droit et dans les pratiques de l’AP et de ses matons longtemps après la disparition du prétexte qui les a initialement justifiées. Francis souligne dans cette lettre lue à l’émission du 15 avril 2022 que le covid ne fait pas exception à la règle.

    Maison centrale d’Arles, quartier d’isolement,

    Le 13 mars 2022,

    Salut à tous,

    Aujourd’hui, voilà deux ans que le covid a posé ses bagages en prison. Mars 2020, premier confinement : pendant des semaines, les visites au parloir ont été interrompues, les UVF annulés… Et dans certaines prisons, cela a mis plusieurs mois à reprendre !

    Beaucoup de mesures sanitaires se sont transformées en nouvelles règles inscrites dans le marbre en détention, et sont appliquées de façon permanente : parloirs vitrés, heures de réservation réduites ‒ parfois plusieurs heures réduites à une seule par jour. Dans beaucoup de prisons, les mesures liées au covid sont devenues un moyen de restreindre les droits : nombre de personnes au parloir réduit à deux ou trois, et en UVF, idem ! Activités en détention annulées, voire complètement supprimées, demande de vaccin ou test pour accéder aux UVF, isolement de personnes ayant eu des contacts au parloir ou au retour d’UVF…

    Bref, sans parler du réel manque d’information, on a pu voir nos droits réduits avec comme seule réponse : « C’est le covid ! »

    Pour info, le 14 mars, le masque n’est plus obligatoire à porter. Donc à toutes et tous ! N’oubliez pas de vous informer et demandez des informations. Dans la majorité des cas, cela n’a été que le moyen de faire régresser les droits et de remettre des vitres dans les parloirs !

    Courage à tous ! Force à tous !

    Francis Dorffer


    « Depuis deux ans qu’il y a ce foutu virus, la détention a beaucoup changé »

    Lettre de DD

    Dans cette lettre lue à l’émission du 1er avril 2022, DD rappelle rapidement les principales restrictions imposées aux Baumettes depuis l’arrivée du covid et la détérioration des relations des prisonnières avec leurs proches qu’elles entraînent, tout en soulignant que même quand on n’a pas de parloirs, on est tout de même affecté par des mesures comme la limitation des activités, et donc des mouvements et des rencontres au sein de la détention.

    Centre pénitentiaire de Marseille-Les Baumettes,

    Le 11 mars 2022,

    Depuis deux ans qu’il y a ce foutu virus, le corona, la détention a beaucoup changé. Personnellement je n’ai pas de parloir, mais je sais que pendant une période ils ont mis les plexiglas aux parloirs, il n’y avait plus d’UVF et le relais mère-enfants était fermé. Sans parler de toutes les activités qui ont cessé et ne sont toujours pas revenu à la normale. Ensuite, il y a plein de postes de travail qui ont été annulés, comme la formation bâtiment, tertiaire, la formation magasinier. Il y avait aussi le linge que la famille amenait à la détention et qui n’était pas donné avant une semaine, voire plus. Depuis, quelques activités ont repris mais très peu. Voilà tout ce que j’avais à dire sur les changements de l’AP.

    DD


    « Si le détenu n’est pas vacciné minimum deux doses, c’est parlu hygiaphone et confiné sept jours »

    Lettre de Kémi

    Kémi nous avait déjà écrit à propos du covid en automne 2021, quand un cluster avait été déclaré à la maison centrale de Saint-Maur ; il dénonçait des conditions sanitaires catastrophiques et la responsabilité des matons dans la propagation de la maladie. En mars 2022, récemment sorti du QI, Kémi constate le maintien de certaines restrictions, comme celles liées à la vaccination ou à la durée des parloirs, alors qu’officiellement, l’AP prétend lever toutes les mesures restrictives liées au covid. Cette lettre a été lue à l’émission du 8 avril 2022.

    Maison centrale de Saint-Maur,

    Le 14 mars 2022

    Salut L’Envolée,

    Ici ils sont pas emmerdants avec le covid, faut juste qu’on porte un masque c’est tout. Moi je suis toujours à la formation « menuiserie » mais je vais voir pour un autre job car celui-là paie pas et je m’ennuie grave. Le formateur c’est un fatigué ce gars ! Bref, je prends mes marques petit à petit, j’ai dû remettre les poings sur les « I » et les barres sur les « T » mais maintenant ça va. Ils ont vu qu’après le QI je suis resté un lion et pas devenu un fatigué !

    Bref, là il est 22 heures et j’écoute le son de NAPS « Les mains faites pour l’or », j’ai fait mes exercices et me suis lavé au lavabo, à l’ancienne les potos MDR.

    En tous cas merci de m’écrire, ça fait grave plaisir, ça me montre que je ne suis pas seul et ça me permet de traverser cette épreuve qu’est la prison. Sérieux, surtout depuis que je suis sorti du QI, quand je reviens du taf et vois que j’ai une lettre, je la lis avant même de manger et ensuite je prends le temps le soir pour y répondre. D’ailleurs merci pour l’enveloppe timbrée, ça me permet de vous rép et ça fait plaisir.

    Pour le covid en prison, ici ils sont tranquilles. Parloirs, UVF, salons : tout est disponible sans restriction. Juste, si le détenu n’est pas vacciné min deux doses, c’est parlu hygiaphone et confiné sept jours, mais si t’es vacciné c’est tout normal et pas confiné. Après ça reste 1h30 à la place de toute la journée et deux visiteurs max mais tu peux négocier pour un mineur en plus de deux majeurs. En détention tout est normal, juste on doit porter le masque sinon rien n’a changé. En plus le masque on le met que quand on a un entretien ou parloir, sinon ils cassent pas les couilles.

    En attendant de vos nouvelles, prenez soin de vous les potos, à+

    Kémi


    « Tout le reste découle de cette inertie de l’ARS »

    Extrait de lettre de Ion Kepa Parot

    Ion Kepa Parot souligne la responsabilité de l’État et en particulier de l’ARS dans la gestion du covid dans cet extrait de lettre lu à l’émission du 8 avril 2022. Au bout de plus de trente-deux ans de prison, à plus de 71 ans, Ion est une personne à risque car il est gravement malade ; de plus, il a eu le covid en prison l’été 2021. Il vient enfin d’obtenir une libération conditionnelle (le 13 octobre 2022), après une énième demande. L’État français persistait jusque-là dans la logique de vengeance qui est la sienne depuis des décennies en rejetant systématiquement ces demandes, alors que Ion avait dépassé sa période de sûreté depuis 2005. Des manifestations avaient eu lieu régulièrement au pays Basque pour exiger sa libération ainsi que celle de Jakes Esnal, lui aussi gravement malade après plus de trente-deux années passées en prison, et celle de tou·te·s les Basques enfermé·e·s du fait de l’acharnement sans fin des États français et espagnol contre ETA (Euskadi ta Askatasuna) même après sa dissolution.

    Centre de détention de Muret,

    Le 16 mars 2022

    […] Pourrais-tu dire aussi, de ma part, à Madame L’Envolée que début décembre 2020, j’avais dit au médecin-chef du centre de détention de Muret qu’il était urgent de vacciner contre la covid-19 sinon nous risquions un cluster important. Et, le cluster s’est installé en mars 2021 (40 détenus confinés durant plus de 20 jours) à cause des retards de l’ARS (Agence régionale de santé). Nous sommes toujours en retard d’une guerre, comme en 1918 et 1940, même pour la santé par manque de vision, de réflexion et de matériel. De plus, l’Institut Pasteur était en retard, il a fallu acheter des vaccins à l’étranger et vacciner, ici au CD de Muret, en juin 2021. Tout le reste découle de cette inertie de l’ARS. Le plus important ce ne sont pas les conséquences mais la cause.

    Ion Kepa Parot